L’expression « salon littéraire » fait partie de ces expressions dont on ne sait plus trop où elles se situent dans la chaîne du livre. Rappelons que la chaîne du livre, dont les chaînons sont plus ou moins nombreux selon les auteurs, a ceci de particulier qu’elle rend compte absolument de l’interdépendance qui existe entre tous les métiers du livre.
Si les auteurs, les éditeurs, les libraires et les lecteurs occupent indiscutablement une place essentielle sur cette chaîne, il n’en est à priori pas de même pour des événements comme, par exemple, les prix littéraires ou les salons littéraires.
Tout simplement, parce que ces derniers pourraient être supprimés sans que cela nuise à la production d’un livre et à sa distribution. Du moins peut-on le croire. Mais, en vérité, si du concept de chaîne du livre on passe à celui de chaîne de valeurs spécifique au livre, la perspective n’est plus tout à fait la même.
Et il se pourrait bien que la hiérarchie entre les chaînons essentiels et ceux qui le sont moins change. Les prix littéraires deviennent alors un élément moteur irremplaçable dans la chaîne du livre, comme d’ailleurs les salons littéraires.
Un salon littéraire, c’est quoi ?
D’évidence, pour bien en apprécier la valeur, il convient de savoir de quoi on parle. Et la première chose qui vient à l’esprit quand on évoque l’idée de salon littéraire, c’est qu’elle renvoie à une réalité multiforme. De fait, il y a salon littéraire et salon littéraire. L’expression peut ainsi faire penser à une pratique bien datée des membres de la république des lettres, à des assemblées ou des réunions d’auteurs et d’amateurs ou encore à des manifestations de grande ampleur s’apparentant à de grandes messes autour du livre.
Le point commun entre ces différentes manifestations, petites ou grandes, récentes ou anciennes, c’est que toutes sont des lieux de discussions et d’échanges ayant exclusivement le livre comme objet.
C’est bien cette caractéristique exclusive qui décrit le mieux ce qu’est un salon littéraire. D’où notre définition :
Un salon littéraire est un lieu d’échanges dont le livre est le sujet principal.
Il en est ainsi quelles que soient les proportions réservées à chacun de ses intervenants, auteurs, éditeurs, etc., selon la nature du salon littéraire, car c’est toujours le livre qui les motive.
Le salon littéraire, une pratique féministe de l’Ancien Régime
Avec le salon littéraire, va la salonnière, expression typique de l’Ancien Régime et de la Troisième République.
Bien avant que le féminisme ne devienne un élément incontournable de la vie politique contemporaine, il a su conquérir des positions influentes dans la société grâce aux salons littéraires, et avant qu’ils ne soient réellement littéraires ou philosophiques, aux salons dits de conversation.
Premier salon littéraire, le salon de Charlotte des Ursins, vicomtesse d’Auchy, 1605
Ambitieuse, la vicomtesse cherche même à faire de son salon, une sorte d’académie, censée régner sur les lettres de son époque. Tallemant des réaux, à l’instar de beaucoup de ses contemporains jugera de manière très critique cette prétention.
Il est vrai que cette attitude vis à vis des femmes intellectuelles était largement partagée par les hommes de ce temps. De fait, on peut considérer la tenue d’un salon littéraire comme une des premières manifestations de revendications à caractère féministe.
Au XVIIème siècle, à la suite du salon de la vicomtesse d’Auchy, on cite en général deux autres salons littéraires d’importance, toujours tenues par des femmes, celui de Mme des Loges et celui de Mme de Rambouillet.
Le salon de cette dernière sera davantage connu sous le nom de « la chambre bleue » plutôt que sous celui de salon de Mme de Rambouillet et sera plus un lieu où l’on pratiquera l’art de la conversation plutôt que celui de la critique littéraire.
C’est de cette époque que date notamment ce qu’on a pu appeler l’esprit français, mêlant adroitement légèreté et profondeur, que pendant des décennies les élites européennes chercheront à acquérir dans les salons parisiens.
Les salons littéraires du XIXème siècle, une pratique mixte
Au XIXème siècle, les choses changent un peu. Les salons littéraires ne sont plus seulement des salons tenus par des femmes du monde, ils s’élargissent aux hommes et s’intellectualisent.
Si au XVIII ème siècle les salons ont servi de chaudron aux idées des philosophes des Lumières, ceux du XIXème siècle, du moins les plus agissants, rassemblés sous un même intitulé, celui de cénacle romantique, ont servi à la diffusion des postures et des partis pris des auteurs romantiques. Sous l’égide du premier d’entre eux, Victor Hugo.
Du cénacle romantique …
L’attractivité du cénacle animé par Victor Hugo, mais aussi, il faut bien le dire, par Sainte-Beuve, a été telle que tous les autres salons, tels que celui de La Muse française ou celui de l’Arsenal, ce dernier animé par Charles Nodier, ont fini par pâlir devant son succès.
Reste que des décennies plus tard, la fièvre romantique s’étant définitivement apaisée, le monde des salons n’a plus été que l’ombre de lui-même et le réceptacle de manières désuètes minutieusement décrites par un auteur qui les connaissait fort bien et qui, pendant longtemps, les avaient vu comme des lieux dont l’accès était éminemment désirable. En tout cas, pour les plus huppés d’entre eux.
Au salon de Madame Verdurin.

C’est de Marcel Proust dont il s’agit. Le salon dont il a fait l’archétype des salons de la Belle Epoque, c’est celui de Mme Verdurin, un personnage clef de son roman fleuve « A la recherche du temps perdu ». Ce salon serait une sorte de condensé de salons bien réels tenus à l’époque par des personnes de la haute société parisienne.
D’après les meilleurs analystes de l’œuvre de Proust, il évoquerait celui de la célèbre comtesse Greffulhe (1860-1952) qui prête aussi ses traits au personnage de la duchesse de Guermantes, ou celui de Madame Arman de Caillavet ou encore celui de Madame Ménard-Dorian. Notons que cette dernière avait épousé Georges Victor Hugo, un petit-fils du grand Victor. Celui de l’art d’être grand-père.
Une phrase extraite de « du côté de chez Swann » en donne le ton dans le style inimitable de Proust :
Toute « nouvelle recrue » à qui les Verdurin ne pouvaient pas persuader que les soirées des gens qui n’allaient pas chez eux étaient ennuyeuses comme la pluie, se voyait immédiatement exclue. Les femmes étant à cet égard plus rebelles que les hommes à déposer toute curiosité mondaine et l’envie de se renseigner par soi-même sur l’agrément des autres salons, et les Verdurin sentant d’autre part que cet esprit d’examen et ce démon de frivolité pouvaient par contagion devenir fatal à l’orthodoxie de la petite église, ils avaient été amenés à rejeter successivement tous les « fidèles » de sexe féminin.
Bref, après ça, la première guerre mondiale en sonnera définitivement le glas. Est-ce à dire qu’il n’y a plus de salons littéraires ? Sous cette forme, sûrement, ou s’ils existent encore, ils n’ont plus du tout la même influence. Aujourd’hui, à l’image de la république des lettres 2.0, ils ont pris une toute autre allure.
Démultiplication contemporaine des salons littéraires
Les salons littéraires existent toujours à l’heure actuelle. Mais, il est certain que les participants à ceux d’hier auraient bien du mal à s’y retrouver. Le nom a subsisté, mais la chose est bien différente. A l’instar de ce qu’on peut appeler la république des lettres.
De fait, on peut classer les salons littéraires d’aujourd’hui en deux grandes catégories : les intimistes et les grandes foires aux livres.
Evidemment, ce sont les premiers qui se rapprochent le plus de ce qu’ils ont pu être autrefois. Cela dit, ils sont tellement multiformes qu’ils s’en distinguent quand même notablement.
Des salons littéraires intimistes et multiformes
Ces nouveaux salons littéraires, nouveaux parce qu’ils ne remplissent plus les mêmes fonctions que ceux qui les ont précédés, en effet, ils ne sont plus l’occasion de mondanités, ni générateurs d’écoles de pensée, peuvent être répartis en quatre types. Néanmoins, tous ont un caractère intimiste, voir confidentiel, bien marqué.
Les cafés littéraires

Sous cette dénomination, on retrouve toutes les initiatives, la plupart du temps individuelles, qui amènent des amateurs, toujours passionnés, à se retrouver régulièrement, dans une arrière salle de café, une salle de médiathèque, ou chez l’un d’entre eux, pour débattre sur un thème particulier ou sur un auteur particulier.
La thématique peut être résolument littéraire, mais elle peut s’élargir à des sujets plus philosophiques, voire même géopolitiques. On pense dans ce dernier cas aux cafés-diplo régulièrement organisés par les très actifs Amis du Monde Diplomatique. Evidemment, leurs thèmes de discussion tournent autour des numéros du Monde Diplomatique.
Les clubs de lecture
Moins ambitieux que les salons littéraires, les clubs de lecture sont aussi une occasion de rencontre conviviale entre lecteurs passionnés et pressés de faire partager leur passion pour un auteur ou un livre aux autres membres du club. ici il ne s’agit pas de refaire le monde, mais simplement de découvrir d’autres auteurs susceptibles de plaire, d’échanger avec d’autres passionnés de lecture et d’une manière générale de passer un moment agréable.
La constitution d’un club de lecture est hyper simple si on veut partager des lectures entre amis en s’inspirant du cercle littéraire des amateurs d’épluchures de patates qui en est, en quelque sorte, l’archétype romancé. La dénomination est effectivement celle d’un roman écrit par Mary Ann Shaffer et sa narration décrit avec la plus grande exactitude le fonctionnement et l’esprit d’un club de lecture entre bons amis.
Mais, il suffit souvent de se rendre à la médiathèque la plus proche pour connaître son offre dans ce domaine. Animés par des bibliothécaires confirmés et amoureux des livres, les clubs de lecture dispatchés selon le genre littéraire retenu, policier ou littérature générale, par exemple, sont une bonne façon de sortir facilement de l’isolement propre à tout lecteur.
Les ateliers d’écriture
Les ateliers d’écriture sont une autre forme de salon littéraire qui nous vient d’Amérique. Le but, c’est d’y apprendre à devenir un écrivain. Dans le monde anglo-saxon, on parle de creative writting course. Autrement dit, de cours d’écriture créative. Et ça marche ! Katherine Pancol ou Philip Roth sont passés par là !
Et les universités françaises s’y sont mises elles aussi. L’université de Toulouse II et celle du Havre ont été les premières à créer un master de création littéraire. Depuis, on ne compte plus les initiatives, publiques ou privées, universitaires ou associatives, pour enseigner l’art de l’écriture.
Cela dit, quelle que soit la forme prise par ces cours qui, d’une manière ou d’une autre, fonctionnent toujours comme des ateliers, ce sont des lieux où naturellement on réfléchit aux techniques d’écriture les plus variées. Ce qui n’est rien moins que reproduire ce que faisait, par exemple, à sa façon, le cénacle romantique des hugoliens.
Les rencontres d’auteur
Le salon du livre, une forme particulière du salon littéraire

Il semble, à priori, difficile de voir dans ces évènements des successeurs aux salons d’autrefois.
Pourtant, plus que les salons littéraires intimistes dont on vient de parler, curieusement c’est eux que l’on qualifie en général de salon littéraire, de salon du livre ou de festival du livre auquel on accroche le nom de la ville où ils ont lieu.
Le mot salon y est alors repris du vocabulaire commercial utilisé pour parler de ces lieux où un grand nombre d’exposants viennent vanter sur des stands appropriés les mérites de leur production agricole, industrielle ou autre, en l’occurrence, éditoriale.
Dans ce dernier cas, il n’en reste pas moins que la finalité d’un salon littéraire proprement dit y est toujours bien présente.
Manifestations littéraires plutôt que salons littéraires
De fait, l’essor des salons littéraires, on dit aussi des manifestations littéraires, est récent. Dans les années 2000, c’était encore un peu de le Far West. Les salons littéraires étaient essentiellement de grosses machineries à dédicaces qui se tenaient dans de grandes villes. De là peut-être l’habitude de les appeler « salons ».
Aujourd’hui, la finalité du salon littéraire des origines est plus que jamais présente avec la transformation progressive des salons littéraires façon salons professionnels en manifestations littéraires à vocation nettement plus culturelle. Le rôle joué par la SOFIA, l’équivalent de la SACEM, mais pour les livres, créée en 1999 par la SGDL et le SNE a été essentiel dans cette évolution ou transformation.
Grâce à l’argent récolté par la SOFIA via le droit de prêt et la rémunération de la copie privée, de nombreuses manifestations littéraires ont pu voir le jour avec des thématiques diverses, dans des lieux quelque fois reculés et le soutien d’auteurs rémunérés pour une prestation ne se limitant plus à la signature de dédicaces.
Action déterminante des pouvoirs publics et des organismes paritaires
Très au fait de toute cette évolution, pour une autrice comme Valentine Goby qui occupe des fonctions importantes dans de nombreuses instances professionnelles et notamment celle d’administratrice de la SOFIA, nul doute :
(Qu’)une manifestation littéraire, c’est une incarnation du livre, de la langue, des artisans qui travaillent .. Une preuve irréfutable de leur existence.
Moyennant quoi sur plus de 7000 évènements culturels recensés en 2018-2019, 12 % correspondent à des évènements littéraires. Autrement dit, près de 1000. Pas mal. Et n’était la crise sanitaire qui a suivi, la tendance est loin de s’être ralentie. D’autant que 40 % de ceux-ci ont été créés dans les dix dernières années.
Le salon du livre, facteur de développement local et de la lecture
Bref, des manifestations littéraires d’intérêt local aux manifestations littéraires d’intérêt régional ou national, le mouvement a pris de l’ampleur. Les financements de la SOFIA y sont sans doute pour quelque chose. Ils se chiffraient quand même à près de 6 millions d’euros en 2022.
Mais ils sont surtout poussés par l’engouement du public pour ce type de manifestation qui ne se dément pas.
Engouement du public d’autant plus fort d’ailleurs que les manifestations littéraires sont aussi considérées par les pouvoirs publics comme des facteurs efficaces de développement local tant ils peuvent renforcer l’attractivité d’un territoire autrement délaissé.
Dés lors, on comprend mieux dans ces conditions, la croissance continue des publications année après année et le rôle aussi déterminant que les prix littéraires que jouent ces manifestations pour le secteur de l’édition.
Les grands salons du livre en France et à l’étranger
Si la plupart des 900 manifestations littéraires ont moins de 5000 participants et un budget dépassant rarement 20 000 euros, elles n’en demeurent pas moins extrêmement recherchées. Elles bénéficient de fait de l’aura qui entoure les puissantes locomotives que constituent les grands salons du livre en France et à l’étranger.
Les grands salons du livre en France
Cinq grands salons occupent incontestablement une place à part en France et drainent chaque année des milliers de participants. De quoi donner envie aux plus motivés d’entre eux d’avoir le « même » à la maison. En tout cas quelque chose qui y ressemble.
Le salon du livre de Paris
C’est la star des stars. Son histoire mérite d’être rappelée. Il démarre en 1981 sous le nom de salon du livre de Paris et sous l’égide du Syndicat National des Editeurs, le SNE. C’est ni plus ni moins qu’une gigantesque librairie censée vider les stocks. Le succès est au rendez-vous.
Les 12000 m2 du Grand Palais se révèlent vite insuffisants pour gérer les flux des dizaines de milliers de visiteurs qui se pressent pensant trois jours dans ses allées. Le salon investit alors le parc des expositions de la porte de Versailles et ses 40 000 m2 en 1994. Le succès ne se dément pas. Les visiteurs sont près de 250 000 en 2000.
Mais trop de succès tue le succès. C’est la crise. Le salon coute trop cher pour ce qu’il rapporte. En 2016, il change de nom, il devient alors Livre Paris. Avec ce nouveau nom, les organisateurs veulent faire évoluer le concept.
Cette évolution n’aboutira qu’en 2022. A partir de cette année là, nouveau nom, Livre Paris devient Festival du Livre de Paris, nouveau lieu, avec le retour au Grand Palais, nouvelles dates, en avril au lieu du mois de mars et sans doute nouveau public, les visiteurs n’étant plus qu’une centaine de milliers.
Désormais, le festival du livre de Paris est bien plus qu’une immense librairie, c’est avant tout la fête du livre avec une programmation extrêmement variée. Celle de 2025 en est une bonne illustration.
Mais, à côté de la grosse machinerie proposée par le festival du livre de Paris, quatre autres manifestations littéraires méritent d’être particulièrement signalées. Du fait, n notamment, de l’importance de la place qu’elles ont su conquérir dans le paysage évènementiel littéraire français.
Livre sur la place de Nancy
En 2025, ce salon du livre fête sa 47 ème édition. En ouvrant ses portes début septembre, il a pour particularité d’être le premier salon national de la rentrée littéraire. Et ce qui ne gâte rien, il se déroule sur la place de la Carrière à deux pas de l’illustrissime place Stanislas de Nancy.
Compte tenu de sa position sur le calendrier, on ne sera guère étonné de savoir qu’il est parrainé par l’Académie Goncourt. Elle y décerne d’ailleurs le Goncourt de la Biographie. Par suite, on voit bien ici le lien qui existe plus ou moins formellement entre les salons du livre, les prix littéraires et l’industrie du livre.
Comme il est désormais de mise pour toutes les manifestations littéraires d’envergure, les visiteurs ont le choix entre un grand nombre d’activités allant des rencontres avec des auteurs à la participation à des ateliers participatifs, des tables rondes, des débats, des conférences, etc.
Evidemment, comme dans n’importe quelle librairie, on peut aussi y acheter des livres et, le cas échéant, les faire dédicacer en suivant. A noter, ce qui illustre bien la taille de l’évènement, qu’en général, plus de 600 auteurs sont de la partie.
Festival international Quais du Polar de Lyon
Voilà carrément un festival du livre incontournable pour tout amateur de polars. En 2025, il en est à sa 21ème édition et se déroule en avril. Du 4 au 6, plus précisément. Pour 2025, il réunit plus de 120 auteurs autour de la thématique de la frontière.
Comme on peut ainsi le constater, le salon du livre se fait ici le promoteur d’un genre littéraire particulier et s’organise autour d’une thématique qui s’efforce de suivre l’actualité du moment.
Quand on sait combien la littérature policière est une littérature populaire comme a pu l’être en leur temps celle d’Eugène Sue ou d’Emile Zola, on comprend d’autant mieux l’intérêt que peuvent exercer sur le grand public les multiples rencontres et discussions avec les auteurs ou les spécialistes du genre.
Dans ce cadre naturellement festif, celui-ci peut sans doute mieux qu’ailleurs faire état des interrogations que lui suscite son quotidien et y trouver peut-être des réponses qui l’aideront à mieux l’affronter. Ce qui est bien la finalité première du salon littéraire depuis ses origines.
Festival étonnants voyageurs de Saint-Malo
Le festival du livre de Saint-Malo est étonnant à plus d’un titre. D’abord, il doit beaucoup à son fondateur l’écrivain et militant de la gauche prolétarienne Michel Le Bris (1944-2021). Diplômé de HEC, il s’en écartera bien vite pour se faire un nom dans l’édition et le journalisme militant.
Auteur prolifique et spécialiste de Robert Louis Stevenson, c’est en 1990 qu’il fonde le festival étonnants voyageurs de Saint-Malo. La particularité de ce festival, outre d’être très marqué par son fondateur, c’est d’être le promoteur du concept de littérature-monde.
Chaque année un prix Littérature-monde, entre autres, est d’ailleurs décerné dans le cadre du festival. Nouvelle illustration du rôle joué par un salon du livre comparable à celui des salons littéraires d’autrefois.
De fait, le festival a des déclinaisons à travers le monde. Citons, notamment, celles de Brazzaville, Bamako, Port-au-Prince et Haïfa. D’une manière générale, il est centré sur les littératures d’Orient, d’Amérique latine et d’Afrique. Cela sous toutes les formes d’expression littéraire. Ce qui ne l’empêche pas d’accorder aussi une place importante au cinéma.
Depuis la disparition de Michel Le Bris, c’est l’écrivain éclectique et lauréat du Goncourt 2004, Laurent Gaudé, qui a pris sa suite.
Festival de BD d’Angoulême, le FIBD
Ce festival de la BD qui est le plus important au monde attire chaque année en janvier près de 200 000 visiteurs à Angoulême. Sa création date de 1974. Et comme on peut l’imaginer, les débuts ont été assez artisanaux. Mais avec le temps et surtout l’explosion du secteur de la BD, le festival devenu FIBD en 1996 est aujourd’hui un acteur essentiel de ce secteur de l’édition.
Ce succès a naturellement fait des envieux. Et les festivals BD se sont multipliés en France. Citons, par exemple, le festival BD d’Arles, celui de Saint-Laurent-sur-Sèvre ou de Boucau. Ou encore le festival BD Bulles de Lunel.
Les grands salons du livre à l’étranger
Le tableau du mouvement des grandes manifestations littéraires ne serait pas complet si on n’évoquait pas les manifestations qui ont lieu à l’étranger. On peut en citer au moins un qui a un caractère plutôt remarquable. En tout cas, les professionnels y participent volontiers.
Frankfurter Buchmesse ou Foire du livre de Francfort

Si on regarde les chiffres, elle est la plus grande foire au monde dans le domaine de l’édition. Elle se tient chaque année à la mi-octobre à Francfort sur le Main en Allemagne. Elle rassemble pas loin de 300 000 visiteurs pour 7000 exposants.
Notons que c’est également la plus ancienne au monde. En effet, dès le 12ème siècle on y a échangé des manuscrits puis, après Gutenberg, des livres imprimés.
De fait, elle a un caractère commercial plus marqué que ses homologues françaises. Les trois premiers jours de la foire sont, notamment, réservés exclusivement aux professionnels du secteur. Ils y négocient entre autres droits d’auteur et droits de diffusion. Elle constitue un excellent baromètre des tendances du secteur.
Helsinki Bookfair, Abu Dhabi International Bookfair, BookCon, etc…
En dehors du mastodonte allemand, d’autres foires du livre atteignent des chiffres respectables en dehors des frontières de l’hexagone. Raison pour laquelle, on peut penser que ces foires et leur évolution progressive à la française tendent à en faire un mouvement mondial.
Cependant, il est difficile de savoir aujourd’hui dans quelle direction ce mouvement va finalement s’orienter.
Le salon littéraire au cœur de la chaîne du livre
Même si on peut dire que la France occupe une place privilégiée dans l’organisation de manifestations littéraires d’envergure, ce qui correspond à une certaine tradition nationale, elle n’est donc pas la seule à en avoir compris tout l’intérêt.
Celui de la lecture en premier lieu, mais pas que. Antonio Gramsci, un des fondateurs du parti communiste italien, a notamment formalisé dans ses cahiers de prison ce que cela pouvait également signifier. C’est lui qui est à l’origine de la notion très galvaudée aujourd’hui d’hégémonie culturelle.
L’idée que cette notion sous tend, c’est qu’avant qu’un type de pouvoir s’impose concrètement, il s’impose d’abord dans les esprits. De ce point de vue, il est évident que les salons littéraires constituent un facteur déterminant de la coloration que peut prendre cette hégémonie culturelle.
Quoi qu’il en soit, les salons littéraires sont plus que jamais concomitants avec l’inflation livresque, sont, à coup sûr, un élément essentiel de la chaîne de valeur du livre tout comme l’impression de livre sur CoolLibri et participent d’un incontestable mouvement en marche vers des horizons littéraires toujours prêts à changer.