Voilà venue la saison des dernières évaluations pour passer d’une classe à l’autre, d’un niveau à un autre, et progresser dans son cursus scolaire ou universitaire. Bien surprenant qu’à un moment ou à un autre n’y figure pas la rédaction d’une disserte’. Pensum pour beaucoup, régal pour quelques-uns, la dissertation est en elle-même un sujet de dissertation constamment renouvelé.

Conseils et méthodes sur l’art et la manière d’écrire une dissertation pullulent sur internet. De quoi s’y perdre. A surtout ne pas consulter la veille d’un exam. Sinon, c’est comme pour la consultation d’un site médical, on finit par se trouver toutes les maladies de la terre.

Alors, plutôt que d’énoncer une énième méthode ou de proposer une compilation de méthodes, essayons de voir ce qu’il y a au coeur de la disserte, littéraire ou pas, et qui puisse servir toute la vie.

 

Qu’est-ce que c’est qu’une dissertation ? 

Ben, c’est simple, c’est la rédac qu’on doit rendre au prof en respectant la méthode qu’il a expliquée pendant ses cours et sur un des thèmes qu’il a développé pendant l’année. Bref, un truc facile ou un calvaire qui fait suer rien qu’en y pensant. De l’autre côté de la barre, disserte égal sujet de devoir à trouver et monceau de copies à corriger pendant des heures, dont une grande partie ne vaut pas un pipi de sansonnet.

 

Qu'est-ce que c'est qu'une dissertation
Qu’est-ce que c’est qu’une dissertation

 

Ne vaudrait-il pas mieux finalement s’en passer ? C’est d’ailleurs le sens d’une question qui a été posée à un panel de 80 professeurs par l’un d’entre eux. 

La dissertation littéraire est-elle aujourd’hui encore un exercice incontournable de la classe de français au lycée ? a-t-il demandé.

Et presque déçu, il répond :

Les résultats d’une enquête auprès de 80 professeurs semblent bien le confirmer. 

Oublions un instant, les conseils, les méthodes, les directives, les injonctions scolaires et concentrons-nous sur la finalité de la dissertation.  En toute indépendance. C’est quoi une dissertation ? C’est une façon d’exposer un raisonnement et ça sert toute la vie. Simple, non ?

De ce point de vue, une dissertation peut prendre tout un tas de colorations. Elle peut être littéraire, philosophique, historique, scientifique, etc. Quant à la forme, elle n’est pas spécialement écrite, elle peut être aussi orale.

Bref, si par le petit bout de la lorgnette, la dissertation peut être vue comme un exercice spécifique, par le grand bout, elle est le véhicule habituel de la pensée. Raison pour laquelle on y a recours depuis longtemps. 

Et pour la petite histoire, elle a d’ailleurs été l’épreuve reine du baccalauréat pendant des décennies.

 

Méthodologie de la dissertation 

Bon, là, il ne faut pas se torturer l’esprit. Pour bien débuter une dissertation, il n’y a qu’une chose à faire. Autrement dit, qu’une seule question à se poser : c’est quoi le problème ? C’est ça la fameuse problématique ! Ce qui revient à dire qu’il ne faut pas chercher midi à quatorze heure, ni à plaquer sur le sujet ce dont on a envie de parler le jour où on écrit. C’est ce qui arrive, malheureusement, pratiquement tout le temps.

Ne pas se laisser entraîner par ses lubies

Pour s’en rendre compte, il suffit, par exemple, d’écouter sans rien dire une conversation entre plusieurs personnes. En général, personne ne s’écoute et chacun cherche le bon moment pour y placer son point de vue. Forcément lumineux !

Lequel, la plupart du temps, n’a que peu à voir avec le sujet de la conversation. Ce qui est, d’ailleurs, dans ce cas, sans importance. 

Rester dans le sujet

Mais, pas dans une dissertation. Le hors sujet est rédhibitoire. Circulez, il n’y a plus rien à voir. Néanmoins, pour être certain de rester dans le sujet, nul besoin d’y passer des heures. Le simple fait de s’y attarder et de se poser la fameuse question « c’est quoi le problème » suffit largement. 

Pour peu qu’on soit honnête avec soi-même et qu’on ne cherche pas à tricher avec le thème proposé.

Est-ce tout ? Non, bien sûr. Mais, si déjà on part dans la bonne direction, ce n’est pas si mal. A partir de là, la mission, « si vous l’acceptez », est simple. Elle consiste à collecter les infos nécessaires au traitement du problème. Et, pour ce faire, nul besoin de cascades en tout genre, ni de se « prendre la tête ».

 

Collecter les informations

Si on a tout le temps voulu pour rédiger la dissertation avec seulement une date limite pour la rendre, il n’y a qu’à aller faire un tour sur internet. Ce qui compte, c’est de ne pas le faire la veille pour le lendemain. Pourquoi ?

Parce que ça permet de ne pas se contenter des premiers lieux communs venus. Et surtout de remonter aux sources et d’en suivre les méandres. Le pire étant d’y rechercher un solution toute faite. 

 

Collecter les informations
Collecter les informations

 

Plus difficile la collecte quand l’exercice doit être fait dans un délai imparti et sans aucun accès à une source d’informations autre que sa seule mémoire. Là, d’évidence, rien ne peut suppléer au manque de travail. Car, au risque de décevoir, la dissertation est loin d’être un jeu et on y excelle d’autant plus qu’on a l’habitude de lire et de se confronter aux grands auteurs classiques

Il n’y a pas que Voltaire et Albert Camus. Et, naturellement, dans leur version intégrale.

 

Prendre des notes

Dans un cas comme dans l’autre, il ne s’agit pas de noter tout et n’importe quoi. Non, uniquement ce qui se rapporte au problème et à sa solution. Et tant qu’à faire, ces notes sélectives, on s’arrange pour les classer au fur et à mesure qu’on les collecte.

Celles qui se ressemblent, comme le dit le proverbe, on les assemble, les autres, on les met à part. Quand on n’arrive pas choisir la bonne catégorie où les mettre, on en ouvre une autre. Celle des « ni ni ».

Reste maintenant à bien organiser ce qu’on va dire. C’est le rôle du plan.

 

Faire un plan de dissertation 

C’est la grande affaire. Un petit tour sur internet et on n’a plus que l’embarras du choix. Il y a le plan en X, en Y, en XY, la thèse, l’antithèse, l’analyse, le Saint Esprit, etc. A vrai dire, le choix d’un type de plan est sans aucune importance.

 

Faire un plan de dissertation 
Faire un plan de dissertation

 

Sauf, si c’est malheureusement une figure imposée. Car ce qui est important c’est d’énoncer clairement ce qu’on à dire pour paraphraser Boileau. Ce qui veut dire aussi des phrases courtes, des mots compréhensibles.

Surtout pas alambiqués ! Ni les unes, ni les autres !

 

 

Ce qu’on dit dans l’introduction d’une dissertation 

Bref, un plan, c’est quoi ? C’est une introduction, un développement et une conclusion. Mais, encore ? Dans l’intro, on dit quel est le problème, en quoi il est important de le traiter, et on annonce les deux ou trois points qu’on va développer avant d’arriver à la conclusion.

Attention, l’intro n’est qu’une intro ! Il ne s’agit pas de la confondre avec le développement. Et puis, si on en a la matière, on peut démarrer par un « opening joke« . Cela a l’avantage d’attirer immédiatement l’attention. C’est aussi ça le but de l’introduction. A user cependant avec modération.

 

Comment on organise le développement d’une dissertation

Le développement reprend, un à un, les points annoncés dans l’intro et en montre les avantages et les inconvénients. A défaut, des avantages et des inconvénients, on peut s’attarder plutôt sur ce qui en fait l’intérêt ou pas. De son point de vue, mais aussi de celui d’autres auteurs.

Tout ça c’est de l’argumentation. En général, sous forme de dialectique. avec analyse du « pour », du « contre » et synthèse oecuménique. L’humanité, le monde, comme il va ou ne va pas, et la société, en prime.

 

Ralph Waldo Emerson
Ralph Waldo Emerson

 

C’est l’occasion de faire quelques citations qui viennent appuyer bien à propos ce qu’on est entrain de raconter. C’est logique. Il serait bien étonnant que quelqu’un n’ait pas déjà dit quelque chose précisément sur ça. Et en cas de panne subite d’inspiration, on peut même partir de là. Car, comme l’a écrit très justement Ralph Waldo Emerson : 

Nos meilleures idées viennent des autres

 

A quoi sert la conclusion d’une dissertation ?

Dans la conclusion, on donne sa préférence. Normal, c’est une conclusion. Avant cela, on résume en quelques mots toute la discussion et on tranche. En tout cas, on donne son opinion. Evidemment, on préfère souvent laisser les choses en suspens.

On ne sait jamais. Comme on ne connaît pas vraiment son lecteur, après tout, à lui de choisir ce qui lui convient le mieux.

Sauf que comme le dit l’Ecclésiaste dans l’Ancien Testament : 

Ce qui fut, cela sera ; ce qui s’est fait, se refera : il n’y a rien de nouveau sous le soleil.

On ne risque donc pas grand-chose à donner son opinion. Tout simplement parce qu’elle ne sera jamais d’une originalité telle qu’elle ne peut manquer de laisser pantois son lecteur. Par contre, une conclusion sous forme d’engagement est toujours sympathique.

Même si on n’y adhère aucunement.

 

Exemple de dissertation 

Cela dit, la dissertation est avant tout un raisonnement. Voire même une esthétique ou un oeuvre d’art. Ce n’est surtout pas du blablabla pour écrivain en herbe.

Mais, du sens, du sens et du sens.  Avec de la justice et de la poésie, si possible, que Diable ! De sorte que, quel qu’il soit, tout sujet est intéressant, parce qu’il pose un problème et que tout problème a des conséquences.

Dans cet ordre d’idée, une des discussions les plus célèbres est celle sur la nature du sexe des anges. Tellement célèbre d’ailleurs qu’on s’en sert encore maintenant pour stigmatiser les discussions inutiles. 

 

Chute de Constantinople en 1453
Chute de Constantinople en 1453

 

Bref, de quoi s’agit-il ? Eh bien, l’expression fait référence à un moment historique réel. Cela se passe en 1453, à Constantinople.

La capitale de l’empire romain d’Orient, l’empire byzantin, est assiégé par les Turcs. Pour autant, les religieux byzantins sont essentiellement préoccupés par la question de savoir quelle peut bien être la nature du sexe des anges. Question sans importance ?

Aujourd’hui, sans aucun doute. A l’époque, pas vraiment. En effet, de la réponse qui peut être apportée à cette question découlent des positions théologiques, par suite, d’éventuelles modifications dans les rapports de force au sein de l’Eglise Byzantine et comme Eglise et Etat ne sont pas séparés, également dans les rapports de force au sein de l’Etat.

Sauf que le moment choisi pour la discussion, autrement dit la disputatio, ancêtre de la dissertation, était, on ne peut plus, mal choisi. Le problème posé était réel sous l’angle de la répartition des pouvoirs, mais son mauvais traitement, notamment l’oubli de ses aspects géostratégiques, a eu des conséquences dramatiques.

Heureusement, toutes les dissertations n’ont pas de tels effets ! Surtout quand elles se déroulent dans un cadre scolaire !  Mais que dire de celles qui prennent la forme de discours politiques ou stratégiques ? Plus souvent qu’on ne pense, on peut y trouver aussi l’expression d’une querelle byzantine, dont la question du sexe des anges n’est que l’archétype.

 

Apprendre à raisonner utilement et efficacement

Tout cela pour dire que la maîtrise de l’art de disserter est, d’abord et avant tout, celle de l’art de raisonner utilement et efficacement. L’avantage irremplaçable de cette maitrise, c’est d’éviter les prises de décision irréfléchies et engagées sous le coup de l’émotion. 

De ce fait, il n’y a pas de mauvais sujets de dissertation. Tous sont également productifs. Et, bien qu’elle puisse apparaître surréaliste, la querelle byzantine sur la nature du sexe des anges est aussi un bel exemple, en particulier, de temps gagné sur l’émotion. En l’occurrence, celle résultant d’un siège et de ses répercussions. A condition, bien sûr, de savoir conclure. 

En raccourci, qu’est-ce que c’est qu’une dissertation ? C’est la revanche de Word sur Excel. Beau sujet de disserte, non ? Et pourquoi pas de livre ou de thèse à auto éditer ?

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