C’est une question qu’on peut légitimement se poser quand on écrit un texte de fiction, mais qui ne se pose guère quand on écrit un texte de recherche. Pourquoi ? Parce qu’un avant-propos remplit une fonction bien précise.

C’est la raison pour laquelle il ne doit pas être confondu avec ces autres paratextes ou textes liminaires que sont, par exemple, la préface ou le prologue. Ou encore l’avertissement. Pourtant, il arrive fréquemment qu’on prenne l’un pour l’autre et que ce qu’on intitule, par exemple, préface ne soit, en fait, qu’un avant-propos.

Par suite, pour bien écrire un avant-propos, mieux vaut commencer par partir d’un bon pied et savoir de quoi on parle au juste. Et pour finir par bien le faire en fonction de la nature du texte qu’il précède.

 

L’avant-propos, qu’est-ce que c’est ?

Ce n’est pas une préface 

C’est déjà ça. Et pourtant, il arrive qu’on confonde une préface avec un avant-propos. On peut même être tenté de dire que le mot préface est, tout simplement, un synonyme, ou un quasi-synonyme, du mot avant-propos.

On se demande bien alors pourquoi on devrait avoir deux mots pour décrire cette même réalité. Disons donc, qu’un avant-propos, c’est le texte qui décrit les raisons pour lesquelles l’auteur a écrit le texte qui suit. Et il est bien évidemment écrit par l’auteur lui-même.

Alors que, pour faire court, et sans entrer dans les détails, une préface parle de l’auteur et est écrite, en général, par quelqu’un d’autre. C’est on ne peut plus clair. Cela dit, ce n’est, bien sûr, pas suffisant pour dire ce qu’est un avant-propos. Autrefois, on parlait, d’ailleurs, de profatio.

Autrement dit, de ce qui se situe avant (pro) la parole (fatio). Pour dire quoi ? Pour dire tout simplement pourquoi on la prend. Ce qui revient, notamment, à préciser :

  • Quelles sont les origines du livre.
  • D’où vient l’idée de l’écrire dans la forme présente.
  • Et dans quel but.

 

Exemple d’une combinaison préface et avant-propos pour un même livre

Pour illustrer le concept, prenons le cas de ce livre savant écrit par Eric Werner, intitulé « L’avant-guerre civile ». Le livre a fait l’objet de deux éditions. Dans sa première édition, sous le titre « avant-propos », l’auteur développe en 8 pages ce qu’il entend par guerre civile et pourquoi cela vaut la peine de s’en préoccuper par les temps qui courent.

 

Eric Werner, intitulé "L'avant-guerre civile".
Eric Werner, « L’avant-guerre civile ».

 

Sa thèse, ou son intuition, ainsi posée dès le début du livre, est que guerres civiles et guerres interétatiques remplissent, au fond, la même fonction. Et tout le texte qui suit n’en est que la démonstration.

Mais, pour la deuxième édition de son livre, il fait précéder son avant-propos d’une préface de 14 pages. Le ton y est beaucoup plus personnel. Et même si elle est écrite par lui-même, et non par quelqu’un d’autre, son point de vue narratif est différent et il y utilise le pronom je.

Et, comme il s’agit d’une préface et non d’un autre avant-propos, il pose un regard distancié et critique sur son œuvre et la manière dont elle a été reçue dans le temps qui sépare les deux éditions. Il y dit que tout bien considéré :

Oserais-je le dire, L’avant-guerre civile a plutôt bien résisté au temps. Il importe en revanche d’en redessiner la toile de fond.

 

Emplacement de l’avant-propos

De ce fait, l’avant-propos se place avant l’introduction proprement dite du texte et après les autres textes liminaires. Par conséquent, une fois lue la dernière ligne de l’avant-propos, débute le texte en tant que tel avec son incipit.

 

ESCHYLE
ESCHYLE

 

Pour notre auteur, cet incipit est une citation tirée des Euménides du tragédien grec Eschyle. Il résume ainsi en une phrase la thèse prédéveloppée dans son avant-propos : 

Qu’on s’échange des joies dans un commun amour et qu’on haïsse d’une seule âme : c’est un grand remède chez les humains.

Le lien est ainsi formé entre l’une et l’autre pièce du texte pris dans son ensemble.

 

Eschyle
Eschyle

 

Comment on écrit un avant-propos ?

Un avant-propos est donc un élément essentiel d’un livre. Cependant, force est de reconnaître que ce côté essentiel varie selon la nature du livre. Incontournable pour une thèse, un mémoire ou un essai, on ne le voit que très rarement dans un roman.

 

L’avant-propos d’une thèse, d’un mémoire ou d’un essai

Pour ce qui est de l’essai, on vient de voir comment ça fonctionne, en gros, avec le livre d’Eric Verner. On retrouve la même trame avec les travaux universitaires demandés aux étudiants de fin de cycle. 

 

TABLEAU QQOQC
TABLEAU QQOQC

 

Même trame, mais avec une structuration beaucoup plus formalisée pour répondre aux exigences de l’exercice. Ce qui, en général, donne un avant-propos en quatre points, de type QQOQC, comme suit :

  • Présentation du sujet et du type de document. Le Quoi et le Quand. 
  • Motivations pour le thème étudié. Le Pourquoi. 
  • Recommandations après étude du sujet. Le Où.
  • Difficultés rencontrées. Le Comment.

En général, chaque institution précise la manière dont cet avant-propos doit être composé.

 

L’avant-propos d’un roman 

Il est rare qu’un auteur de roman fasse précéder son texte d’un avant-propos. En général, il préfère, quand cela lui est possible, une préface, voire une postface. Mais, certains auteurs comme Balzac et son célèbre avant-propos, décrivant ce qu’il a voulu faire avec sa comédie humaine, ou encore Georges Sand, parmi d’autres, y ont eu recours. 

 

GEORGES SAND
GEORGES SAND

 

Dans la mare au diable, Georges Sand ne fait pas précéder son roman d’un avant-propos, proprement dit, mais d’un chapitre intitulé « L’auteur au lecteur », et c’est tout comme. Elle le commence en citant un vers de Holbein et après 5 pages d’un court développement, qu’elle qualifie de digression, elle le conclut de manière très explicite et conforme à tout avant-propos, de la manière suivante : 

C’est à propos d’un laboureur que je me suis laissé entrainer à cette digression. C’est l’histoire d’un laboureur précisément que j’avais l’intention de vous dire et que je vous dirai tout à l’heure.

 

En résumé

L’avant-propos est ce qu’on appelle un paratexte, placé avant le texte principal, c’est pourquoi on parle aussi de texte liminaire. C’est un texte incontournable pour tout travail de type universitaire, mais accessoire pour un roman. Quoique !

En effet, même dans ce dernier cas, il peut jouer un rôle de première importance. Comme la rubrique « qui sommes-nous » d’un site web. Et, si on prend l’exemple de l’avant-propos écrit par Balzac, on peut dire qu’il  est, sans conteste, la clef de tous les romans qui constituent sa Comédie humaine.

Quant à Georges Sand, si l’ambition est moindre, son chapitre de « L’auteur au lecteur » est aussi, incontestablement, une clef qu’elle donne à ses lecteurs pour mieux leur faire comprendre ses intentions. Ce qui est l’essence même d’un avant-propos.

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