Bien qu’elle ait connu un sursaut pendant la crise sanitaire, la lecture n’est pas dans le top 10 des activités préférées. Raison pour laquelle on peut se poser la question de savoir si les librairies ont encore un avenir. Elle figure certes en bonne place parmi celles des personnes âgées, mais pour ce qui est des jeunes, on en est loin. Un jeune français sur cinq ne lit jamais et en est très satisfait. Et ça ne s’arrange pas avec le temps. On trouve de plus en plus d’adultes très fiers de ne jamais lire.
Evidemment ces tendances, soigneusement suivies par des indicateurs comme ceux mis au point pour le baromètre Ipsos-CNIL focalisé sur les français et la lecture, ont un impact déterminant sur le commerce du livre assuré par les librairies et leur stratégie marketing. Il en ressort que d’évidence, le libraire amoureux de ses livres et ne voulant vendre que les livres qu’il aime est assurément une espèce en voie de disparition. Ce double constat est-il pour autant le signe annonciateur d’une disparition progressive des librairies ? Oui et non, tout dépend de ce qu’on entend par librairie.
Une librairie, c’est quoi au juste ?

La question peut surprendre. Tout le monde est passé au moins une fois dans sa vie devant une librairie. C’est écrit dessus et la vitrine de l’endroit est suffisamment grande pour que tout passant, même le plus obtus, comprenne que c’est un endroit où on vend des livres. Toute sortes de livres, des grands et des petits, certains très colorés et d’autres bien austères, avec beaucoup d’illustrations ou au contraire d’apparence bien bien rébarbative.
Librairie et bibliothèque
Pour les amateurs, une librairie est néanmoins un peu plus qu’un commerce comme un autre. Ils ne font pas que passer devant, ils y entrent. Un petit nombre d’entre eux se souviennent que ce faisant ils entrent aussi dans une bibliothèque. Le fait est que le mot librairie vient du latin libraria qui signifie précisément bibliothèque. Autrement dit, un lieu où des livres sont en dépôt et conservés plutôt que destinés à être dispersés.
Etant donné qu’ils sont rares et précieux. Evidemment, ce sens premier a quasiment disparu des librairies contemporaines. Il est désormais exclusivement utilisé pour décrire des lieux uniquement consacrés au dépôt de livres et à leur conservation. Ces lieux peuvent être, publics ou privés, modestes ou impressionnants. Il n’en reste pas moins qu’aucune librairie contemporaine, si petite soit-elle, manifeste toujours, d’une manière ou d’une autre, cette fonction première.
Librairies et centres culturels
Cette origine première des librairies n’est pas sans lien avec le rôle d’animation culturelle que pratiquement toutes les librairies jouent là où elles sont implantées. Cette animation va du simple conseil du libraire à ses clients à la participation à des évènements culturels de plus ou grande ampleur, telles que des foires, des salons ou des festivals, en passant par des rencontres avec des auteurs lors de séances de dédicaces.
Bibliothèque implicite, Centre culturel explicite, une librairie est indéniablement un lieu porteur de sens pour une ville ou un bourg, voire un village. Dans ce dernier cas, citons par exemple, celui de Conques, pas très loin de Rodez, qui avec ses 237 habitants n’en dispose pas moins de deux librairies fort bien achalandées. Il est vrai que le village de Conques est aussi celui de l’abbaye du même nom laquelle est triplement remarquable.
Par sa situation privilégiée sur le chemin de Saint Jacques de Compostelle, son trésor millénaire dont la richesse est unique en Europe, et ses vitraux non moins uniques, véritables télescopes métaphysiques, dus à la main et à l’esprit du créateur génial qu’a été Pierre Soulages (1919-2022).
Librairies, lieux d’attraction et de développement économique
Les librairies ne sont donc pas que de simples commerces de livres et mais comme tout commerce elles sont aussi, naturellement, des facteurs de développement économique. Certains villages l’ont parfaitement compris et ont fait même de ce commerce l’axe principal de leur développement.
Villages du livre et des arts

Ainsi, par exemple, de Montolieu. Ce village d’Occitanie, d’un peu plus de 800 habitants, situé près de Carcassonne, accueille ainsi chaque année plusieurs festivals dédiés aux livres et aux arts. Labellisé village du livre et des arts, on y trouve pas moins de quatorze librairies.
Sept autres villages en France bénéficient du même label. Le mouvement étant international, on en trouve aussi, labellisés de la même façon, aux Etats-Unis, au Royaume-Uni, en Belgique, aux Pays Bas, en Suisse, en Norvège et au Japon. Preuve s’il en était besoin de l’intérêt économique que représente en soi une librairie.
Librairies et aménagement du territoire
Certes, en l’occurrence, l’intérêt économique avec le label village du livre et des arts est largement fondé sur le tourisme. Plus que sur le développement d’une filière particulière.
Cependant, il est clair aussi que la présence d’une librairie dans une ville ou un bourg contribue à son attractivité de la même façon que la présence de services publics aussi essentiels qu’une école ou qu’un bureau de poste.
Par ailleurs, bien évidemment, le chiffre d’affaires d’une librairie, les salaires versés à son personnel, contribuent, bien sûr, à la richesse globale du territoire où elle se trouve.
Origines et évolution des librairies
De quand date la première librairie ?
La question est un peu pernicieuse. Tout dépend de ce qu’on désigne par librairie. Si on y voit avant tout une boutique avec une enseigne bien placée dans une rue passante d’une grande ou d’une petite ville, alors nul doute qu’on puisse voir dans la livraria Bertrand, ouverte à Lisbonne en 1732, la plus ancienne des librairies au monde.
Quand le commerce des livres a-t-il commencé ?
Evidemment, si on oublie un instant ce que peut représenter le mot librairie et qu’on s’intéresse plutôt au commerce des livres, la question des origines change de perspective. En effet, le commerce des livres existe depuis fort longtemps. On peut dire même qu’il est quasiment concomitant avec l’invention et la diffusion de l’écriture.
Antiquité du commerce des livres
Il n’a somme toute pas fallu très longtemps pour passer de l’écriture simple objet de comptabilité à l’écriture moyen de transmettre des idées. Peu importe dans ces conditions la nature des supports : tablettes d’argile, papyrus, parchemins, etc.
De sorte que très vite les historiens, mais aussi les commentateurs d’œuvres littéraires de la haute antiquité, ont pu constater qu’il existait bien des siècles avant JC un commerce d’écrits en tout genre. Irène Vallejo raconte cette histoire avec brio dans son livre intitulé « L’infini dans le roseau, l’invention des livres dans l’antiquité ».
Premières boutiques de livres
Signalons une autre étape importante de ce commerce celle qui est à l’origine du mot stationary en anglais. Aujourd’hui, ce mot désigne une papeterie, mais son étymologie renvoie aux stationaires médiévaux. On les appelait ainsi parce qu’ils étaient obligés de vendre leurs manuscrits à partir d’un point fixe et non par colportage. On peut dire que nos bouquinistes parisiens installés avec leurs boîtes à livres sur les quais de la Seine leur ressemblent encore comme deux gouttes d’eau.
Bien sûr, les livres qu’ils vendaient étaient un peu différents, même très différents, puisqu’ils s’agissaient alors de manuscrits. Rien à voir, évidemment, avec ce que nous appelons aujourd’hui manuscrit. Ils étaient effectivement écrits à la main et dupliqués par un plus ou moins grand nombre de copistes. De ce fait, ils étaient plus proches des rouleaux de papyrus du monde antique que du livre moderne né avec l’invention de l’imprimerie.
La librairie moderne, un univers impitoyable
Depuis leurs lointaines origines, les librairies et leur monde ont bien changé. Non pas qu’on n’y trouve pas encore des librairies où le temps semble s’être arrêté, mais surtout parce que comme la plupart des autres commerces traditionnels, il a subi, entre autres et de plein fouet, une double révolution, comme le montre une étude détaillée réalisée pour le ministère de la culture, celle de la grande distribution et celle d’internet. La première date des années 60 du siècle précédent, la seconde, du début du XXIème siècle.
Impact de la grande distribution sur le commerce du livre
On a souvent tendance à l’oublier, mais l’hypermarché est une invention française. Le premier à avoir été ouvert est celui de Carrefour, à Sainte Geneviève des Bois, dans l’Essonne, le 15 juin 1963. A partir de cette date, les hypermarchés ont essaimé sur l’ensemble du territoire national et les enseignes se sont multipliées.
Résultat, beaucoup de commerces traditionnels, dont beaucoup de librairies, ont disparu. Grâce aux hypermarchés, il est, en effet, plus facile de faire toutes ses courses au même endroit, d’y stationner sans difficulté et de profiter des prix attractifs que les centrales d’achats permettent d’obtenir en faisant pression sur les producteurs, quels qu’ils soient.
Cependant, cette évolution ne s’est pas faire d’un coup. Il a fallu attendre qu’il y ait suffisamment d’hypermarchés en activité. De sorte que cette évolution ne devient réellement significative qu’à partir des années 90. Ainsi de 1994 à 2006 la part dans le marché du livre, des grandes surfaces spécialisées (Fnac, Cultura, etc.) passe de 11,3 % à 21,8 % et celle des grandes surfaces non spécialisées passe de 13,7 % à 21,2 %.
Impact d’internet sur le commerce du livre
Autre impact très fort sur le commerce du livre, plus récent, puisque lié à l’essor de l’usage d’Internet, les ventes de livres via notamment les plateformes spécialisées où Amazon se taille la part du lion. Au début des années 2000, elles ne correspondaient qu’à 0,9 % des ventes totales, mais dès 2008, elles atteignaient déjà 7,9 %.
Inutile de préciser que la tendance n’a fait que s’affermir depuis. Mais, il convient de noter que désormais les ventes internet ne sont plus uniquement le fait de grandes plateformes comme Amazon.
En effet, beaucoup de librairies traditionnelles se sont dotées de sites web qui leur sont propres sur lesquels il est possible de commander et de réserver le livre de son choix. Avantage non négligeable, dans ce cas de figure, le lecteur ne paie son livre qu’au moment où il le retire et non pas au moment où il le commande.
C’est notamment, par exemple, ce que propose la très ancienne librairie Tonnet à Pau, fondée en 1797, qui fait notamment face à la concurrence d’un magasin Fnac très actif et très bien implanté.
Résistance des librairies indépendantes
Signe que les librairies indépendantes après avoir accusé le coup dans un premier temps ont su s’adapter à la nouvelle configuration du marché du livre, les créations de nouvelles librairies sont de plus en plus nombreuses en France. Mieux, le nombre de créations est plus important que celui des fermetures de sorte que le solde net est largement positif. Trois facteurs peuvent expliquer cette évolution. Du moins, en France.
Prix unique du livre
Imposer un prix unique au livre quel que soit le canal de distribution comme cela a été fait par la loi Lang du 10 août 1981 a constitué un acte de sauvegarde essentiel des librairies indépendantes. L’important ici n’est pas de donner libre cours à une idéologie fondée sur la libre concurrence, mais de penser l’économie en termes d’aménagement du territoire. D’évidence, le prix unique du livre a permis à de nombreuses librairies de centre ville ou de centre bourg de résister à la pression des centres commerciaux installés en périphérie. Depuis son adoption, la loi Lang a servi de modèle à de nombreux autres pays.
Accroissement spectaculaire du nombre de parutions
Autre facteur important expliquant la résistance des librairies indépendantes, l’accroissement spectaculaire des parutions. On aurait pu croire qu’avec un temps de lecture moyen plutôt en régression du fait de la multiplication des consoles de jeu et autres divertissements télévisuels ou numériques il en aurait été de même des parutions, eh, bien, que nenni !
Si en 1990, on pouvait comptabiliser la parution de 39200 titres, ce montant s’élevait 10 ans plus tard à 51 900, et 30 ans plus tard, en 2021, à 109 500 ! Et dans ce dernier cas, 36 % des titres parus correspondaient à de nouveaux titres. C’est dire l’importance du grossissement des flux livresques !
Et naturellement, les librairies indépendantes peuvent sembler plus aptes à en « évacuer » la plus grande part qu’une grande distribution se contentant la plupart du temps à n’offrir à ses clients qu’un panel restreint de titres « sûrs » à rotation rapide.
Professionnalisation des libraires et des librairies
Le fait est que les libraires ne sont pas des vendeurs comme les autres. A la différence des vendeurs de la grande distribution, ils ne se conçoivent pas comme des chefs de rayon, même s’ils en ont forcément la fonction. Cette différence est très nette quand on considère le rôle qu’ils jouent dans le cadre d’une librairie indépendante.
En effet, ils sont capables de conseiller leurs clients sur les titres les plus susceptibles de leur convenir. Et par ailleurs, lecteurs accomplis, ils indiquent leurs goûts et leurs préférences à ceux d’entre eux n’ayant aucun a priori de lecture ou curieux par nature.
Le libraire indépendant, un lecteur accompli au moins autant qu’un chef de rayon
De nombreux petits cartons décrivant leurs ressentis sur tel ou tel livre constellent ainsi les tables des différentes sections de leur offre produits en complément de ce qu’ils peuvent en dire, le cas échéant, nommément.
Rien de tel, évidemment, au rayon livres d’un hypermarché, ni même finalement à ceux d’une grande surface spécialisée dans le commerce du livre. La fonction chef de rayon l’emporte ici souvent sur celle de libraire, jusqu’à quelque fois l’effacer complètement.
Typologie actuelle des librairies contemporaines
Jusqu’à présent nous avons principalement évoqué les librairies indépendantes face à la grande distribution et la profondeur historique du commerce du livre, Dans un cas comme dans l’autre, nos propos reflètent les évolutions du métier de libraire au fil du temps. Mais, elles les reflètent seulement en partie.
Pour bien en compléter le tableau, il est nécessaire d’en dresser la typologie actuelle. De ce point de vue, on peut dire que les librairies contemporaines peuvent être classées dans deux grandes catégories :
- celle des librairies bien installées dans le paysage du commerce du livre, on peut de ce fait les qualifier de librairies classiques ou de librairies traditionnelles,
- et celle qui correspond des librairies expérimentant des concepts nouveaux ou originaux et pour cette raison qu’on peut qualifier de concept stores.
Preuve s’il en est besoin de la réactivité permanente du secteur. Ajoutons qu’on ne s’intéresse ici qu’aux librairies physiques et non virtuelles.
Les librairies classiques ou traditionnelles
Les librairies classiques ou traditionnelles sont toutes celles qui ont bien trouvé leur place dans le commerce du livre et répondent à un besoin clairement identifié et stabilisé. Elles sont de trois sortes : les librairies indépendantes, les chaînes de librairies et les librairies spécialisées. Mais, leur noyau dur est incontestablement constitué par les librairies indépendantes.
Importance des librairies indépendantes
De fait, la France compte actuellement plus de 3000 librairies indépendantes. D’après le syndicat de la librairie française, elles constituent un des réseaux les plus denses au monde. et le premier circuit de vente en France. Leur part de marché est de 40 % devant tous les autres distributeurs, y compris internet. Ce qui fait qu’un livre sur deux est acheté en librairie indépendante.
Librairie indépendante, définition
Mais, qu’est-ce que c’est qu’une librairie indépendante ? C’est simple. Selon le site web Librairies indépendantes en Nouvelle Aquitaine :
Il n’existe pas à ce jour de définition officielle de ce qu’est une librairie indépendante. ( Cela dit) une librairie est indépendante lorsqu’elle n’appartient pas à une chaîne, un groupe d’entreprisses. Elle a donc pleinement la maitrise de son fonctionnement, de ses achats, des livres et des maisons d’édition qu’elle souhaite mettre en avant.
Autour de ce noyau dur, on trouve donc les chaînes de librairies telles que Le Furet du Nord, La Fnac, Leclerc, Cultura, ou encore Decitre. Quant aux librairies spécialisées, ce sont aussi pour la plupart des librairies indépendantes, mais spécialisées dans un type particulier d’ouvrages.
Les librairies concept stores
Un concept store, qu’est-ce que c’est ? Si on veut le définir simplement, c’est un commerce qui combine plusieurs activités sur son lieu de vente sur un mode et dans un cadre convivial. En général, à l’activité commerciale principale, on ajoute, par exemple, de la restauration, de la déco., des animations, etc.
Cela dit, si on veut éviter un méli mélo contre productif, il convient, notamment, de veiller à la cohérence de la palette des services ou des produits offerts, à bien équilibrer leur diversité, à leur composer un cadre original ou singulier, et tempérer l’ensemble par des animations adaptées.
Pour ce qui concerne les librairies, un bon exemple est donné avec la librairie La mouette rieuse située au cœur du Marais à Paris. Sur son site, elle présente son concept de la manière suivante :
C’est une librairie. Mais pas que ça, c’est un concept store culturel situé au cœur du Marais historique. Sin ambition est de renouveler l’accès au livre dans un espace pluri culturel. La Mouette rieuse est un véritable lieu de vie : sa librairie, son café, sa galerie, et ses pop up stores forment un entremêlement malicieux et subtil.
Dix librairies emblématiques
Avec le temps, certaines librairies sont devenues mythiques et emblématiques. Cette notoriété, elles la doivent à plusieurs caractéristiques. Citons, entre autres, leur situation géographique, leur poids économique, leur histoire, leur atmosphère, ou encore, la notoriété de leurs clients.
A Paris, la librairie des anglophones et des anglophiles, Shakespeare and Company
Si on prend, par exemple, la librairie Shakespeare and Company. Installée Paris, depuis 1951, beaucoup de spécialistes avertis du monde des libraires considèrent que c’est la plus iconique de toutes. Elle doit ce statut particulier à l’importance de son fonds anglophone. Mais aussi, au fait qu’elle est devenue un lieu de rencontre incontournable entre lecteurs et grands écrivains anglo-saxons de passage, ou vivant, à Paris.

A Porto, la Livraria Lello, une librairie musée
On a cité plus haut la librairie Bertrand, de Lisbonne comme étant la plus ancienne d’Europe. On peut ajouter à la liste des belles librairies portugaises, la Livraria Lello, de Porto. Fondée par un français, heureux gagnant au loto, elle a été rachetée après sa mort par un esthète portugais amoureux des livres. On se rend à la librairie comme à un musée. Il faut d’ailleurs prendre un ticket pour y accéder. Le fait est qu’on peut considérer la livraria Lello comme une des plus belles au monde. Sinon la plus belle.

A Venise, la Libreria Acqua Alta, les étagères y sont remplacées par des gondoles
La libraria Acqua Alta, de Venise serait également la plus belle au monde. Le cadre de la ville des doges y est sans doute pour beaucoup. Le fait est qu’en montant l’escalier fait de vieux livres à l’arrière du magasin, on peut avoir une vue unique sur le canal. Quant aux livres, le risque qu’ils prennent l’eau lors des habituelles inondations y est tel qu’on n’a finalement rien trouvé de mieux pour les protéger que de les stocker dans des gondoles ou des baignoires ! Du moins, c’est ce qu’on veut faire croire ..

A Maastricht, la librairie Boekhandel Dominicanen est dans une église
A Maastricht, au Pays Bas, l’esprit fuse ! En tout cas, il peut souffler tout à son aise sur les livres que la librairie Boekhandel Dominicanen propose dans ses allées. Rien d’étonnant à cela. La librairie occupe le vaste espace d’une église dominicaine, d’où le nom, vieille de 700 ans. A défaut d’y être brusquement inspiré, on peut toujours y prendre un bon café dans le chœur de l’église.

A New York, The Strand Bookstore, bien sûr !
On est sûr, ou presque, de trouver le livre qu’on cherche partout en vain quelque part sur un des rayonnages de la Strand Bookstore. Normal, c’est dans ses gènes depuis ses origines à la fin des années 20. Car la Strand Bookstore, c’est sans doute la plus grande librairie de livres d’occasion au monde. Elle rassemble près de 2,5 millions de bouquins en tout genre, sur trois niveaux et 5000 m2. Créé par Benjamin Bass en 1927, c’est toujours un membre de sa famille qui en assure la direction.

Avec la librairie El Ateneo Grand Splendid, à Buenos Aires, en Argentine, les livres font leur théâtre
De passage dans la capitale argentine, c’est la visite à ne pas manquer. Du moins, si on est un amoureux des livres ! Qu’on imagine ! Un théâtre avec ses ors et ses tentures. Trois étages de balcons, comme il se doit. Et les livres alors ? Eh bien, ils ont remplacé les fauteuils ! De la fosse d’orchestre jusque dans les loges. Comme il n’y a pas si longtemps encore, le théâtre faisait vraiment fonction de théâtre, alors, quand on entre dans la librairie El Ateneo Grand Splendid, une des plus belles au monde naturellement, c’est tout juste si on n’entend pas quelque lieder de Schubert interprété par un artiste de renom.
D’ailleurs, un piano à queue trône sur la scène restée intacte et chacun peut s’installer au clavier, s’il est disponible, pour y jouer son morceau préféré. Rien d’étonnant donc à ce que les visiteurs s’y précipitent, ils sont ainsi près d’un million chaque année à admirer les volutes rococo du plafond de la coupole de 20 mètres de diamètre, 4 mètres plus haut.

Se dépayser résolument avec la Cafebreria El Pendulo de Mexico
Encore une librairie qu’on peut classer parmi les plus belles au monde. D’abord son nom annonce la couleur. C’est la contraction du mot café et de celui de librairia. Le fait est qu’à l’origine El Pendulo faisait voisiner un café, une librairie et une galerie d’art. Aujourd’hui, on y trouve toujours cette triple dimension, mais en beaucoup plus grand et beaucoup plus savant. La cafebreria aujourd’hui c’est toute une ambiance. On y va autant pour s’y détendre, s’y divertir ou s’y promener, la végétation est là pour créer l’illusion d’une balade tropicale, que pour y acheter des livres. Fort de son succès, la cafebreria est un des centres culturels les plus connus d’Amérique latine et a commencé à essaimer son concept un peu partout.

Daunt Books, Londres
Remonter le temps avec la librairie Daunt Books à Londres, au 84 Marylebone High Street, c’est possible. La devanture de Daunt Books, tout en bois et à l’enseigne vert bouteille, d’époque édouardienne, parait modeste, mais elle ouvre sur un monde tout droit sorti de celui d’Harry Potter. Passé la porte d’entrée, le temps semble s’y ralentir. Elle donne accès à un vaste hall tout en longueur agrémenté de balustrades de chaque côté. A l’origine, on venait surtout y chercher des livres rares. Aujourd’hui, on peut tout y trouver et profiter de sa salle de lecture surplombée par une verrière pour y passer des moments paisibles. Loin de tous les bruissements de la ville.

La Powell’s City of Books, de Portland, dans l’Oregon
Elle ne fait peut-être pas partie des plus belles librairies du monde, mais elle est assurément la plus plus grande librairie indépendante du monde en livres neufs et d’occasion. Elle est répartie sur cinq sites à Portland et dans les environs de Portland. Plus de 500 employés en assurent l’exploitation qui n’est pas que consacrée à la vente de livres. Sur son site principal, la Powell’s city of Books on peut rencontrer des auteurs et participer, entre autres, à des ateliers d’écriture ou des clubs de lecture. C’est un vrai petit-grand royaume dédiés aux livres, aux lecteurs et aux auteurs et il n’est pas à New York.

City Lights Booksellers and Publishers, à San Francisco, en Californie.
Troisième librairie notable aux Etats-Unis, c’est peut-être trop, mais difficile de passer à côté de la City Lights tant elle est emblématique de tout un état d’esprit californien. Fondée par le poète Lawrence Ferlinghetti en 1953, elle s’est définitivement inscrite dans le paysage californien du jour où le poète et fondateur a gagné son procès contre la ville de San Francisco qui l’avait accusé de publier des obscénités pour avoir publier le recueil d’Allen Ginsberg » Howl and other poems« . Spécificité de la city lights outre son progressisme et son internationalisme invétérés, elle est aussi une maison d’édition et une fondation, la City Lights Foundation.

Les librairies et leur futur
Ce qu’illustrent la petite dizaine de librairies emblématiques précitées, qui ne sont d’ailleurs loin d’être les seules, on peut notamment citer à juste titre pour figurer dans cette catégorie d’autres libraires comme, par exemple et entre autres, Kinokuniya, au Japon ou Dymocks, en Australie, c’est que l’univers des librairies est bien loin d’être fini.
Le plaisir de lire un livre papier ne se dément pas
Et cela d’autant plus que sans être aussi emblématiques bien d’autres librairies tirent leur épingle du jeu. Comment l’expliquer ? Tout d’abord, la diversité des médias possibles n’a en rien éliminer le plaisir de lire un livre et un livre papier. Et ce plaisir correspond à un besoin qui doit toujours être satisfait. Notons qu’il croit d’ailleurs à proportion de la population et de sa part de lettrés.
Gérer une librairie n’exclut pas d’avoir une stratégie et un bon contrôle de gestion
Mais, d’évidence, le futur des libraire et des librairies nécessite de faire preuve d’imagination et de réflexion managériale. D’une manière ou d’une autre, une librairie est certes un commerce pas comme les autres, mais est tout de même un commerce. Et pour cette raison, une librairie se doit d’être au clair sur ce qui fait sa spécificité, sur comment avoir la meilleure productivité possible et sur le choix des secteurs où concentrer les moyens capables d’assurer son développement ou de maintenir son périmètre.
Les exemples de « mix librairie » ne manquent pas
A vrai dire, il y a presque autant de librairies que de libraires. Autrement dit, hors mis le fait que dans une librairie on vend des livres, il y a de multiples façons de le faire. Toutes plus ingénieuses les unes que les autres.
Ce que nous qualifions de « mix librairie » correspond à cet assemblage subtil entre des rayonnages de livres, le lieu où ils sont installés, la nature de l’animation qui les entoure et l’image dont ils bénéficient.
Suivant les choix opérés par les libraires, on a ainsi des librairies plus ou moins spécialisées dans certains types d’ouvrages, installées dans dans des lieux plus ou moins emblématiques, faisant l’objet d’animations plus ou moins culturelles ou divertissantes et bénéficiant ou non de l’appui et des services partagées propres à une chaîne de librairies.
Les librairies à l’aube du XXIème siècle
En résumé, les librairies ont évidemment toujours un avenir. On lit toujours et on lira encore dans les temps futurs. Les foules qui se pressent dans les salons du livre ou les foires du livre en sont un bon indicateur. Et de fait, on aura toujours besoin de conseils, ceux des libraires, et de lieux où « palper » les livres, ceux offerts par les librairies.
Des librairies toujours en vogue
Evidemment, les services proposés par les librairies ne peuvent qu’évoluer en fonction du temps qui court. Il ne s’agit là que d’adaptations toujours évolutives au service fondamental rendu par la lecture.
Parmi ces adaptations, il y a bien sûr les services complémentaires proposés par les bibliothèques en ligne telle que, par exemple, la bibliothèque très fournie de CoolLibri. Ils permettent d’explorer de nouvelles offres souvent ignorées par les maisons d’édition traditionnelles et de découvrir de nouveaux auteurs de talent.
En bref, plus que jamais l’avenir est à la lecture et donc aux auteurs car elle seule permet de s’affranchir d’une information « prédigérée » et souvent mal construite. Au demeurant, la qualité de l’écriture des auteurs s’est bien améliorée. Grâce notamment aux ateliers d’écriture et aux nombreux conseils qui leur sont désormais accessibles.
Des auteurs toujours plus nombreux et plus qualifiés
Ce n’est donc pas pour rien que selon le baromètre des médias 2025, établi par La Croix-Verian-La Poste, la confiance des personnes interviewées dans le monde médiatique ne cesse de chuter. Les sources d’information alternatives ne manquent pas et les publications autoéditées, en forte hausse, y sont sûrement pour quelque chose.
Ainsi, à l’heure actuelle, pour 62 % des français, il faut se méfier de ce que disent les médias sur les grands sujets d’actualité. On est désormais bien loin de cette période, pourtant pas si lointaine, où toute une famille pouvait se réunir à heure fixe devant le petit écran pour écouter quasi religieusement le narratif d’un présentateur vedette.