Les clubs de lecture dans leur forme traditionnelle ont souvent une image un peu compassée. On y voit, en général, des personnes relativement âgées, plutôt de sexe féminin, rassemblées dans un salon autour d’une tasse de thé. Mais, quelle qu’en soit l’image, non seulement les clubs de lecture survivent, mais ont même tendance à se développer. C’est qu’ils répondent à un réel besoin. Le lancement récent d’un book club par l’appli TikTok en est une belle illustration. Dès lors, quand on est auteur, on peut légitimement s’interroger sur l’impact que peuvent avoir les clubs de lecture sur son écriture.
Les clubs de lecture, c’est quoi ?
Avant d’en venir à l’intérêt qu’un club de lecture peut présenter pour un auteur, commençons par voir de quoi il retourne.
Définition du club de lecture
Un club de lecture, ce sont essentiellement des lecteurs qui se réunissent pour parler des livres qu’ils ont lus. Partant de là, quelle que soit la nature du club de lecture, un tas de figures sont possibles. Selon, notamment, la périodicité retenue pour les réunions, le choix des livres et la manière dont la réunion est animée.
Nature du club de lecture
Un club de lecture peut être de trois sortes en fonction de sa nature. En effet, ce peut être un club de particuliers, un club institutionnel ou un club virtuel.
Club de lecture de particuliers
C’est le club de lecture dont la nature est la plus ancienne. Des passionnés de lecture décident un beau jour de se réunir au domicile de l’un d’entre eux pour parler de leur passion commune, à partir de la lecture d’un ou plusieurs livres.
Un beau film réalisé par Mike Newell, sorti en 2019, retrace avec beaucoup de sensibilité l’atmosphère de ce type de club. Le film, qui s’intitule « Le cercle littéraire des amateurs d’épluchures de patates« , raconte l’histoire d’une écrivaine qui retrouve l’inspiration après avoir été invitée par l’un des participants à l’une des séances du club.

Le film est lui-même une adaptation, très réussie, d’un roman épistolaire, écrit par Mary Ann Shaffer et Annie Barrow. Ce dernier, publié en 2008, rencontra un énorme succès. Depuis, des communes, comme celle de Sanguinet, dans le sud-ouest ont, elles aussi, leur cercle littéraire des éplucheurs de patates.
Club de lecture institutionnel
Pas très loin derrière le précédent, en termes d’ancienneté, le club de lecture institutionnel est un club dont les participants appartiennent à une même structure, entreprise ou administration. Cette appartenance résulte de leur statut, en tant que membre du personnel ou adhérent à un de ses services.
Un des cas les plus fréquents est celui des clubs de lecture organisés et mis en œuvre, en particulier, par des médiathèques. Pour y participer, il suffit d’y être connu comme lecteur. La médiathèque de Romainville, en Seine-Saint-Denis, en a même fait un de ses axes d’animation privilégiés. En effet, elle propose pas moins de trois clubs, selon l’âge des participants.
Le nouveau club de lecture de Tik Tok
TikTok l’a dit, TikTok l’a fait. Le réseau social, dont le hashtag #BookTok frôle les 65 milliards de vues cumulées, vient de franchir une nouvelle étape. Il vient de lancer son propre club de lecture, le Tik Tok Book Club. Et pour cette première, place aux classiques. Comme premier titre proposé aux fans, il propose « Persuasion », le célèbre roman de Jane Austen.
Pour dire la vérité, la diffusion quasi simultanée sur la chaîne Netflix de son adaptation très « moderne » du roman a peut-être joué un rôle dans le choix de la date pour ce lancement et dans celui du titre. Toutefois, l’appli nie toute manœuvre malicieuse de ce type. Elle rappelle que le hashtag # AustenTok fonctionne déjà très bien sans ça. De plus, la communauté BookTok a déjà montré un réel engouement pour des classiques comme Gatsby le Magnifique de Francis Scott Fitzgerald.

Toujours est-il que le passage d’un titre dans le book club d’un réseau social comme TikTok a des effets immédiats sur les ventes en librairies. Certaines l’ont d’ailleurs bien compris. Elles ont, de fait, réservé des espaces spécifiques pour les livres qui y font l’objet de commentaires.
Les autres clubs de lecture virtuels
Cela dit, Tik Tok n’est que la pointe immergée d’un iceberg qui prend chaque jour de plus en plus d’importance. Beaucoup de clubs de lecture virtuels fleurissent sur Facebook ou Instagram. D’autres sont liées à de célèbres émissions télévisées comme l’Oprah’s Book Club ou encore font l’objet d’un site web en bonne et due forme.
Dans ce dernier cas, un des plus actifs et des mieux conçus est le site Livraddict. Il organise chaque mois une discussion sur une lecture commune. Le choix du thème, du livre et de la date de la discussion est décidé le mois d’avant et fait l’objet d’un vote par les personnes intéressées. Par ailleurs, un mois sur deux, le book club devient un book club graphique.
En résumé, si on en croit certains commentateurs bien avisés :
Les clubs de lecture regagnent leurs lettres de noblesse en ligne.
Si tant est qu’ils les avaient réellement perdues, peut-on être tenté d’ajouter. Ce qui conduit tout droit à la question suivante, celle de l’intérêt qu’un club de lecture peut représenter pour un auteur.

Intérêt des clubs de lecture pour un auteur
Un auteur est toujours un lecteur
On pourrait se dire que lorsqu’on devient auteur, on passe en quelque sorte de l’autre côté de la barrière et que, de ce fait, on n’est plus lecteur. Rien n’est évidemment plus faux ! Car, lire est une incontournable source d’inspiration. Que ce soit pour admirer ou pour rejeter. Mais, comme l’a écrit Nicolas Davila :
Bien écrire consiste à décrire une courbe avec le moins de tangentes possibles.
La courbe, c’est celle suivie par le rythme, ou le cours, de son inspiration. Les tangentes, ce sont les sources extérieures de cette même inspiration. Elles sont nécessaires, car ce sont elles qui déterminent les points qui infléchissent la courbe de ce qu’on écrit et lui donnent du sens. Toutefois, elles ne peuvent, assurément, être prédominantes. En effet, dans ce cas, elles enlèvent toute substance à la nouvelle œuvre.

Tel est le fil du rasoir sur lequel tout auteur qui se respecte se doit de cheminer.
Les clubs de lecture : outils d’information efficaces
Quoi qu’il en soit, un auteur a tout intérêt à savoir ce qui se lit. Du moins, s’il veut être dans l’air du temps. Celui que décrivent les critiques littéraires de la presse écrite et de la télévision. En général, les clubs de lecture répercutent auprès de leur membres ce que les premiers en disent.
De ce point de vue, ls considérations, les commentaires des membres du club de lecture sur les livres choisis dans ces conditions aident indiscutablement tout auteur qui s’y astreint à mieux comprendre les motivations de leurs lecteurs.
Aller régulièrement faire un tour sur TikTok book club, ou n’importe quel autre forum littéraire, au sens large, ne peut être que riche d’enseignements. Et nul doute que cette meilleure compréhension ne soit, par le fait même, une source d’inspiration.
Cependant, tout dépend de l’objectif poursuivi par l’auteur, car, comme le rappelle également Nicolas Davila :
Les grands livres se défendent en ne paraissant pas grands au lecteur qu’ils ne choisissent pas.
Autrement dit, il faut aussi savoir s’affranchir de ce qui s’apparente à une pensée « mainstream ». En tout cas, si l’on veut écrire quelque chose d’original et de novateur.
Les clubs de lecture : moyens promotionnels
On le sait, pas de succès en librairie sans une bonne promo. En général, c’est ce qu’on délègue volontiers à l’éditeur quand on parvient à signer un contrat d’édition. C’est aussi ce qui est, également en général, le moins bien suivi par les auteurs qui préfèrent se concentrer sur le pourcentage de leurs droits d’auteur.
Avec, toujours, en général, bien peu d’effet, car, en dehors des auteurs à forte notoriété, ce pourcentage n’est, la plupart du temps, pas négociable. Être publié est déjà en soi une grâce que l’éditeur fait à l’auteur dont il accepte le manuscrit.
D’où le recours, de plus en plus en grand, à l’autoédition. Même pour des auteurs confirmés. Après tout, si c’est pour gagner « trois francs six sous » avec un contrat d’édition classique, autant s’en occuper soi-même.
D’autant qu’avec un petit nombre d’ouvrages diffusé par ce biais, on obtient bien plus de recettes qu’avec un grand nombre laissé au bon vouloir d’un éditeur quel qu’il soit.
Cela dit, pour que ça marche, il faut savoir endosser l’habit du « marketer ». Ce qui n’est pas, naturellement, toujours très commode. Savoir écrire est une chose, savoir vendre, en est une autre. Oui, mais il y a des « trucs » qu’un auteur, qui est aussi un lecteur, ne l’oublions pas, peut faire, sans se renier, et qui aident à vendre.
Participer à un club de lecture en est un. On peut y être un lecteur assidu, s’y faire connaître aussi comme auteur auprès des participants qui eux-mêmes connaissent d’autres lecteurs, etc… Comme on est en autoédition, vendre plusieurs dizaines d’ouvrages dans ces conditions et en tirer profit, ça va vite.
D’autant qu’on peut démultiplier la formule en s’inscrivant à plusieurs clubs de lecture, physiques et virtuels. Ou encore, en s’y faisant inviter comme auteur, quand l’occasion se présente. Et pourquoi pas même, créer son propre club de lecture, virtuel de préférence, ce qui permet d’accroître sensiblement le nombre de participants.
Bref, le club de lecture peut être aussi pour un auteur autoédité un outil promotionnel de poids.
En résumé
Les clubs de lecture sont loin d’être dépassés. Et même quand ils prennent la forme de clubs de lecture virtuels, ils sont en plein essor. De sorte que les auteurs auraient bien tort de les ignorer.
D’abord, parce qu’ils sont une très bonne source d’information sur ce qui plait aux lecteurs. Et, par ailleurs, parce que bien utilisés, ils peuvent aussi être de très bons moyens de promotion d’un livre autoédité.
Pour finir, et de manière totalement désintéressée, on peut dire, comme Daniel Pennac, que de toute façon :
La lecture est un acte de création permanente.
