Guillaume Musso, vous connaissez, bien sûr ! Mais, si par aventure vous ne le connaissez pas, c’est depuis douze ans l’auteur qui vend le plus de bouquins chaque année en France. En 2022, il en a encore écoulé près de 1 400 000 ! Si on additionne tous les exemplaires vendus depuis le début de sa carrière d’écrivain, commencée en 2001, on arrive à un total de plus de 40 000 000 ! Oui, vous avez bien lu, plus de 40 millions ! ça en fait des droits d’auteurs ! Ajoutons y pour bien prendre la mesure du phénomène que les livres de Guillaume Musso ont été traduit dans plus de 40 langues et que deux d’entre eux ont fait l’objet d’une adaptation cinématographique. Alors qu’est-ce qui fait donc le succès de Guillaume Musso ? Et son modèle est-il reproductible ?

La formation et l’éducation, premiers facteurs expliquant le succès de Guillaume Musso

Sa mère était directrice de la médiathèque d'Antibes
Sa mère était directrice de la médiathèque d’Antibes

Guillaume Musso n’est pas né de la dernière pluie comme les champignons. Il a bénéficié tout d’abord d’un milieu familial très favorable, puis d’études centrées sur la littérature, et enfin d’un goût pour l’écriture qu’il a su cultiver très tôt.

Milieu familial de Guillaume Musso

Tout petit Guillaume Musso a baigné dans les livres. Sa mère était directrice de la médiathèque d’Antibes  et il y a passé de longues heures à lire. Ce qui est important là-dedans, c’est le fait de lire et d’y avoir été encouragé par sa famille. 

Ce bain permanent dans les livres, il n’en a pas été le seul à en bénéficier puisque ses deux frères en ont également bénéficié. D’ailleurs, les trois frères ont fait des études littéraires et sont devenus des profs de français et de latin grec. Si Julien n’écrit pas encore, Valentin a franchi le cap et écrit à son tour des bestsellers.

Preuve que la recette doit être bonne. De plus, Guillaume Musso a écrit quelque part que Jane Eyre, de Charlotte Brontë était un de ses romans préférés. On le comprend. Les trois sœurs Brontë, Charlotte (1816-1855), Emily (1818-1848) et Anne (1820-1849), sont toutes trois issues d’un milieu de lettrés comme les frères Musso.

Personnalité de Guillaume Musso

Sans entrer dans les détails d’une intimité qu’on ne peut connaître, on peut néanmoins noter deux ou trois choses, ou expériences, qui ont durablement marqué la vie de Guillaume Musso, indépendamment de son milieu familial.

 Génération America

La première, c’est la découverte de l’Amérique dans les années 90 et la fascination qu’elle exerce sur lui. C’est l’époque où les Pet Shop Boys chantent « Go West » pour célébrer la fin de l’URSS et en font un succès planétaire.

La pop française ne sera pas en reste. Elle a déjà montré la voie dès les années 70 avec le tube de Joe Dassin « L’Amérique. Bientôt suivi par celui de Julien Clerc, « La Californie », celui de Maxime le Forestier,  » San Francisco » ou celui du groupe Téléphone,  » New York ».

C’est précisément à New York que Guillaume Musso restera quelque temps comme vendeur de « ice creams ». Cette immersion dans l’univers us de Guillaume Musso ne s’arrêtera pas là.

Comme il aime à le dire, il a été un fan de la série TV  » The West Wing« , plus connue sous le nom de « A la maison blanche », qui décrit les tribulations du président us, incarné par Martin Sheen, en 7 saisons et 155 épisodes, formatés par Aaron Sorkin, à partir de 1999.

Cette immersion va laisser des traces, notamment, sur la manière d’écrire de Guillaume Musso, très cinématographique et très efficace

Expérience de mort imminente 

A 24 ans, en 1999, il a un terrible accident de voiture sur la route entre Nice et Montpellier. Il est alors professeur d’économie, vit une belle histoire d’amour avec Suzy, et a publié un premier livre, resté relativement confidentiel. Il raconte :

Ce soir à, je rentre d’une visite surprise à Suzy. Je roule dans la nuit, perdu dans mes rêveries, quand soudain un choc d’une violence inouïe me ramène à la réalité. Je perds le contrôle de ma voiture. Je heurte violemment la rambarde de sécurité. Je suis déporté sur l’autre côté de la route. Je fais plusieurs tête-à-queue  et la violence est telle que, pendant une seconde, je suis persuadé que je vais mourir.

Sa voiture est littéralement fracassée. Néanmoins, il parvient à s’en extraire, un peu groggy, mais indemne. A partir de là, son existence prend un nouveau cours. Ayant vécu une expérience de mort imminente, comme tous ceux qui sont passés par là, il revoit l’ordre de ses priorités.

C’est alors qu’il écrit son premier bestseller « Et après » publié en 2004. Lequel se passe à New York, après l’attentat du 11 septembre.

 

Style d’écriture et thématiques de Guillaume Musso

Style d’écriture de Guillaume Musso

Le style adopté par Guillaume Musso s’inspire de sa connaissance du cinéma américain. Ses chapitres sont courts, visuels, comme des plans de film et les scènes dialoguées y sont très nombreuses. 

Par ailleurs, il s’attache à bien camper chacun de ses personnages en décrivant avec précision les univers dans lesquels ils évoluent. Comme il le dit  lui-même :

Mon style s’efforce de suivre mon personnage et de coller à sa pensée.

Enfin, Guillaume Musso s’inscrit délibérément dans la tradition de la littérature populaire. De fait, pour lui, la littérature forme un tout et aucun genre, somme toute, n’a de prééminence sur un autre. Dans un de ses livres, il fait d’ailleurs dire à l’un de ses personnages :

Il y avait toujours un moment avec les gens comme Audibert où cette expression, (la vraie littérature) – ou celle de vrai écrivain – revenait sur le tapis. Or je n’avais jamais laissé à personne le droit de me dire ce que je devais lire ou pas. Et cette façon de s’ériger en juge pour décider ce qui était de la littérature et ce qui n’en était pas me paraissait d’une prétention sans borne.

Thématiques de Guillaume Musso

Même si Guillaume Musso aime bien rappeler qu’il n’a ni recette, ni méthode, il n’en reste pas moins que dans chacun de ses romans, on retrouve les mêmes ingrédients. 

Le suspens

A commencer par le suspens. Chacune de ses intrigues est construite comme un mécanisme d’horlogerie. De fait, avant de se lancer dans l’écriture proprement dite de son roman, il peut passer jusqu’à six mois pour la mettre au point. 

Dans un de ses romans les plus achevés, « La vie secrète des écrivains« , paru en 2019, il commence par un prologue d’emblée mystérieux. Pourquoi un auteur à succès a-t-il brusquement cessé d’écrire vingt plus tôt, alors qu’il n’a encore publié que trois titres ?

Tout de suite après, l’intrigue se noue  avec la description des doutes et des atermoiements d’un jeune auteur dont le premier manuscrit vient d’être refusé par toutes  les maisons d’édition auxquelles il l’a envoyé. 

Au demeurant, le livre est une bonne entrée en matière pour tout aspirant à l’écriture d’un roman.

Un amour contrarié 

Deuxième ingrédient, l’histoire d’un amour contrarié. Amour souvent tragique qui bouleverse à jamais l’existence des protagonistes. Là, on n’est pas loin de ce qui fait le succès des romances, mais c’est là un ressort dramatique dont on aurait tort de se priver. 

On en a un bel exemple dans Jane Eyre, une des lectures préférées de Guillaume Musso et, au passage, un classique de la littérature anglaise du XIXème siècle. On peut y suivre l’héroïne lutter contre l’adversité, d’abord suscitée par une tante haineuse, puis par la découverte du terrible passé de l’amour de sa vie au moment même, « tadam »,  où ils vont se marier !

Un peu de surnaturel 

Denis Grozdanovitch
Denis Grozdanovitch

Autre ingrédient important, une pincée de surnaturel. La plupart des romans de Guillaume Musso font intervenir à un moment ou à autre ce qu’on peut appeler la destinée, en tout cas, quelque chose, d’apparemment surnaturel, qui là encore va être source de rebondissements. 

Ce n’est pas si éloigné que ça de la vraie vie. Carl Jung a fait un sujet d’étude de beaucoup de ces évènements qu’il a nommés synchronicités. Et tout un  chacun, un tant soit peu observateur, a pu faire au moins l’expérience de ces drôles de coïncidences, heureuses ou malheureuses, qui suggèrent l’existence d’une autre réalité.  

A noter qu’un auteur comme Denis Grozdanovitch en a fait le thème principal d’un de ses derniers livres « La gloire des petits choses » qui a été récompensé par le prix Roland de Jouvenel de l’Académie française.

Un parcours initiatique

On veut dire par là que les romans de Guillaume Musso sont aussi d’une certaine façon des romans d’apprentissage. On parle aussi de roman de formation ou de roman d’éducation. Si on veut faire savant, on peut dire aussi Bildungsroman.

Autrement dit, au début du roman, les protagonistes, forcément les plus jeunes, bien sûr, voient les choses sous un certain angle. 

Des dizaines de pages plus loin, correspondant à plusieurs mois ou années, et après différentes épreuves qu’ils ont du affronter, tant bien que mal, leur regard change. Pour y  faire face,  ils ont du murir d’une manière ou d’une autre.

On considère que l’archétype de ce type de roman a été écrit par Goethe avec « les années d’apprentissage de Wilhelm Meister ».

 

Les éditeurs de Guillaume Musso

Ils sont au nombre de deux et ils ont joué un rôle certain dans sa façon de conduire ses intrigues. 

XO éditions

La maison d’édition, dont les deux lettres sont le symbole d’un bisou et d’un câlin, a été lancée début 2000 par Bernard Fixot. Guillaume Musso a donc été un de ses tout premiers auteurs. L’objectif de la maison est de repérer les ouvrages qui peuvent toucher un large public et s’exporter en dehors de l’hexagone.

De fait, sur près de 500 titres publiés en plus de 20 ans, deux tiers ont figuré sur les listes des meilleures ventes  et plus de la moitié ont été vendus à l’international. D’une certaine façon, la ligne éditoriale de la maison ressemble beaucoup à celle de Netflix.

Cela dit, après avoir publié ses 15 premiers romans chez XO, Guillaume Musso a publié les suivants chez Calmann Lévy à partir de 2018. A noter que cette année là correspond à la publication de « La jeune fille et la nuit » qui constitue avec « la vie secrète des écrivains » (2019) et « La vie et un roman » (2020), la trilogie des écrivains.

Ce faisant, l’écriture de Guillaume Musso s’est approfondie et sa thématique est devenue plus ambitieuse.

Calmann Lévy

Evidemment, la maison n’a rien à voir avec XO Editions. C’est une des plus anciennes ! Elle a été créée en 1836 ! Au cours de ses 50 première années d’existence, la maison acquiert une réputation littéraire solide et à son catalogue ne manque aucun grand nom de de l’époque.

Dans les années qui suivent, l’éditeur garde la ligne. Il publie le premier livre de Proust, les pièces de théâtre de Tristan Bernard, les poèmes d’Anna de Noailles ou encore de auteurs étrangers comme Gorki, Pirandello, D.H Lawrence ou Henry James. Rien  donc que du beau monde !

En 1993, Calmann Lévy rejoint le groupe Hachette. Son catalogue s’est élargi et est devenu plus éclectique. On y trouve, outre Guillaume Musso, d’autres « locomotives » tels que Pierre Lemaitre, Yann Queffelec, Laurent Gounelle ou Bernadette Dupuy.

Aujourd’hui, Calmann-Lévy est le 3ème éditeur français de littérature générale. 

 

Ce qu’il faut en retenir quand on veut se lancer dans l’écriture

La première chose sans doute à retenir de l’expérience de Guillaume Musso, c’est qu’avant d’être un écrivain à succès, il a été un gros lecteur. Ce qu’il doit sûrement continuer à être. Prétendre écrire en avouant, ou en se vantant même, ne jamais lire, constitue incontestablement un handicap.

Mais que lire ? Pas forcément que des classiques, même si Guillaume Musso a été fasciné par quelques uns. L’essentiel, comme il l’a écrit quelque part, est que la lecture reste un plaisir.

Autre chose importante, ne pas se laisser obnubiler par le style. Certes, mieux vaut écrire correctement, c’est-à-dire en ayant le souci d’une orthographe irréprochable, mais pour le reste, le style est quelque chose qui reste de très personnel. Cela dit, le rythme cinématographique est une bonne source d’inspiration.

Par ailleurs, on ne saurait trop insister sur le soin à apporter à la construction d’une intrigue et à la présence dans celle-ci des ingrédients indispensables qui font une bonne histoire. Ce qui veut dire aussi qu’on écrit avant tout pour ses lecteurs avant de le faire pour soi-même.

Ce que Umberto Eco, cité par Guillaume Musso, résume abruptement :

Tout ce qu’un auteur écrit pour lui-même, ce sont des listes de courses, qu’il peut jeter ses achats terminés.

Cela dit, si on veut en savoir plus sur sa conception de la littérature et de l’écriture, on peut lire avec profit les trois romans qu’il a consacrés à ce sujet réunis sous le titre unique de « Trilogie de l’écrivain« . Et on peut aussi suivre son actualité et ses commentaires sur son blog perso

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