Le format poche est un format qui a acquis ses lettres de noblesse. Les salons qui lui sont consacrés se sont multipliés ces dernières années.
Un salon comme celui de Saint Maur en Poche en est à sa 11 ème édition. Celui-ci se déroule chaque année en juin et il attire désormais près de 25 000 visiteurs.
Et les 250 auteurs qui viennent y présenter leurs œuvres ne rechignent pas à dédicacer les petits livres bon marché. Loin de là ! D’ailleurs, ce salon n’est plus le seul dans son genre. Son succès a fait des émules.
Cela n’a pourtant pas toujours été ainsi. De fait, à une certaine époque, pas si lointaine, auteurs, libraires et lecteurs voyaient d’un mauvais œil ce qu’ils considéraient volontiers comme des sous-livres.
Quant aux pionniers de l’édition de poche, ils tâtonnèrent beaucoup avant de s’imposer. Oui, mais le marché de l’édition a évolué et le livre de poche en constitue maintenant une grosse part.
Des raisons techniques et commerciales expliquent l’importance prise par l’édition de poche. Ce qui revient à se poser la question de savoir ce qu’est un format de poche et qu’est-ce qui différencie un livre de poche d’un livre broché.
Qu’est-ce donc qu’un format poche ?
Définition du format poche
Un livre en format poche est un livre de petite dimension ou de petit format. En général, il fait 11 cm de large pour 18 cm de hauteur.
Pour cette raison, il tient facilement dans une poche. C’est très pratique, notamment quand on prend le train.
D’ailleurs, une des premières collections de livres de poche s’appelait la bibliothèque des chemins de fer. Cependant, la principale raison au choix du format de poche pour un livre est un choix économique et le ciblage d’un nouveau segment de clientèle.
Le format de poche est une dimension économique
Le côté pratique du livre du poche est une chose, sa dimension économique en est une autre. Les dimensions réduites du livre de poche déterminent ses coûts de fabrication.
Avec un format 11 cm x 18 cm, une feuille de papier, une fois pliée, permet d’imprimer jusqu’à 24 pages. En effet, suivant la hauteur du livre, on le classe dans une des sept catégories allant du grand in-folio de plus de 40 cm au petit in-32 de moins de 10 cm.
Un livre de poche entre dans la catégorie des in-12, d’où les 24 pages données par une feuille pliée. Donc, plus le format est important, plus il faut de feuilles, et par conséquent, plus les coûts de fabrication sont élevés.
Et inversement. Par ailleurs, pour un livre de poche, nul besoin de coudre des cahiers et de les encoller, ni de choisir un papier de grande qualité.
De plus, la couverture est souple et ne nécessite aucune reliure. D’où l’intérêt, quand il s’agit de cibler une clientèle dont le budget livres n’est pas très important.
Les différentes collections actuelles au format poche
Le « livre de poche » est le nom d’une collection détenue à 60 % par Hachette et à 40 % par Albin Michel. Mais d’autres collections sont aussi des collections au format livre de poche sans en avoir le nom.
On peut ainsi citer les collections « Pocket » et « 10/18 » du groupe Editis. A noter également, les collections « Folio » de Gallimard, « J’ai lu » de Flammarion, « Points » des éditions du seuil.
Pour les principales, en France. Bien sûr, les collections au format poche sont nombreuses à l’étranger.
Le petit pingouin noir et blanc des éditions de poche Penguin est bien connu des anglais. En Allemagne, les Fisher taschenbuchen du groupe d’édition Holzbrinck et les livres de poche btb de la maison d’édition Goldmann répondent au même besoin.
Cela dit, les conceptions et les formats peuvent varier très sensiblement d’un pays à l’autre.
Quelle est la différence entre un livre de poche et un livre broché ?
Rien à voir avec une différence de contenu : il y a autant de mots dans un livre de poche que dans le même livre broché. Seulement, le livre broché, du fait de son format plus grand, est plus agréable à lire.
Mise en page plus aérée, lettres plus grandes, meilleure prise en mains, notamment. Toutefois, pour profiter de tous ces avantages, il faut aussi disposer d’un coin lecture approprié.
Il est certain que dans le métro il est plus facile de lire un livre dans sa version poche que dans sa version brochée. « And last, but not the least », un livre de poche est nettement moins cher qu’un livre broché.
Son prix dépasse rarement 9,9 €, et il est souvent plutôt proche de 7 € que de 9 €, alors que sa version brochée avoisine les 20 €.
L’opposition de Julien Gracq
Il n’en reste pas moins que des auteurs, suivant en cela l’exemple de Julien Gracq, entré de son vivant dans la prestigieuse bibliothèque de la Pléiade, n’aiment pas être publiés en livre de poche. Car ils considèrent que c’est une dénaturation de leur œuvre.
Pour eux, la littérature exige un effort et une attention pour être réellement appréciée à sa juste valeur. Dans ces conditions, la lecture dans le métro est quasi un sacrilège.
D’ailleurs, Julien Gracq adorait les livres dont il fallait couper les pages. Mais, il faut bien dire qu’ils sont très rares, aujourd’hui, à avoir cette opinion. Le marché et les lecteurs font la loi.
Origine du format poche
Henri Filipachi, inventeur du livre de poche ?
Mais au fait, d’où vient le format poche ? On dit souvent que l’inventeur du livre de poche est Henri Filipacchi et que son invention date de 1953, année de son lancement par la librairie générale française.
Oui et non, en vérité. Oui, c’est bien Henri Filippacchi qui a lancé la collection que l’on connaît maintenant sous le nom de « livre de poche » (LGP).
La légende dit même qu’il en aurait eu l’idée en voyant un soldat américain, la fin de la deuxième guerre mondiale étant encore très proche, couper un livre en deux et glisser chacune des parties dans une des poches de son treillis.
Taillandier, première maison d’édition propriétaire de la marque « livre de poche »
Non, car ce sont les éditions Taillandier qui les premières ont utilisé la dénomination « livre de poche » pour baptiser l’une de leurs collections. C’était en 1916 et l’objectif était de concurrencer une collection du même genre des éditions Fayard.
La librairie générale française, qui depuis 1992 fait partie du groupe Hachette, a donc du racheter la marque « livre de poche » aux éditions Taillandier.
Gervais Charpentier, inventeur du format poche
Pour ce qui concerne, l’origine du format, il faut, en fait, remonter un peu plus le cours du temps. Sous l’ancien régime, l’ancêtre du livre de poche actuel s’appelait livre de colportage et il faisait partie de ce qui était alors connue comme la bibliothèque bleue.
Bon, les ouvrages n’étaient pas de très grande qualité et ressemblaient plus à des fascicules qu’à des livres. En réalité, le vrai inventeur du livre de poche s’appelle Gervais Charpentier.
C’était un éditeur belge, et il est le premier à avoir publié les grands classiques de la littérature, au format 11,5 cm x 18 cm, au prix bon marché de 3,50 francs. La collection s’appelait la bibliothèque Charpentier et elle a été lancée en 1830.
Les débuts difficiles du format poche
Progressivement, tous les grands éditeurs se sont mis à faire du format poche. Citons, par exemple, la « bibliothèque des chemins de fer » de Louis Hachette en 1853 ou « le livre populaire » des éditions Fayard en 1905.
Mais, cela n’a pas été simple. Ainsi qu’on l’a indiqué, beaucoup d’auteurs se sont montrés réticents. Et pas seulement eux.
Des lecteurs, aussi, comme cet étudiant en médecine de 1964, un peu pédant, retrouvé sur une vidéo de l’INA. Quant aux libraires, ils y ont longtemps vu une attaque dirigée contre leurs affaires et leur marge commerciale.
A tel point, que beaucoup d’entre eux les cachaient dans un recoin de leur librairie.
Le livre de poche, pilier du marché du livre
Toutes ces réticences, si elles n’ont pas complètement disparu, sont aujourd’hui bien atténuées. La multiplication des salons dédiés au format poche en est une illustration.
Mais, surtout, le petit format constitue un pilier du marché de l’édition. A titre d’exemple, si on a pu observer en 2018, une nouvelle baisse, cette fois de 1,7 %, du marché du livre en France, et cela pour la quatrième année consécutive.
Ce n’est pas le cas du segment constitué par le livre de poche.
Le format poche, 25 % du marché du livre
En effet, pour cette année 2018, le format poche dans ses différentes collections a constitué près de 25 % des ventes de livres en volume. Évidemment, beaucoup moins en valeur, seulement, 16 %.
Ce qui est encore très élevé. Et quand on regarde la nature de ce qui est publié en format poche, la domination du format est encore plus flagrante.
Car, c’est près de 65 % de la littérature contemporaine qui est publié dans ce format. De ce fait, le livre de poche est désormais un élément incontournable de l’édition et tout ouvrage populaire est quasiment assuré d’être publié en format poche, un an après sa publication dans un autre format, notamment broché.
Le livre numérique : une menace ?
Cependant, la croissance, année après année, des livres numériques peut menacer cette domination. Ils sont moins chers que les livres de poche et les lecteurs peuvent les emporter partout avec eux.
Avec la même facilité que les livres au format poche. Et même plus.
Un lecteur avec sa liseuse ou son ordinateur portable peut emmener avec lui toute une bibliothèque. Ce qu’il ne peut pas faire avec des livres de poche. Même avec la meilleure volonté du monde.
L’avenir dira ce qu’il en est, mais, quoiqu’il en soit, le plaisir de tenir un livre papier entre les mains, même de petite taille et bon marché, ne sera jamais remplacé par une page d’écran.
super aticle
Bonjour, et merci Pierre. 🙂
N’hésitez pas si vous avez des questions.
Bonjour, article très intéressant, mais je me demandais si l’ISBN est le même pour le poche que pour le broché ou s’il en faut un pour chaque format ?
Bonjour,
Merci pour votre question. L’ISBN restera le même pour votre livre papier quel que soit son format, c’est seulement lorsque vous souhaiterez passer également à la diffusion numérique qu’il vous faudra vous procurer un second numéro. 🙂
Je me suis mis à lire grâce aux liseuses. Je déteste le format papier.