Bonne pioche ! Ou plutôt, bonne question ! Car le storytelling est une affaire qui marche. Avis à tous les auteurs en mal de publication. En effet, c’est fou comme le storytelling a la cote. Agences de pub, équipes de campagne électorale, services marketing, institutionnels, etc., tous, à un moment ou à un autre, ont recherché un bon storyteller. Et la raison en est simple.

Certes, comme souvent, le concept a d’abord été développé aux Etats-Unis. Par des spécialistes, entre autres, tels que Steve Denning. Mais surtout, parce que c’est efficace ! Ne dit-on pas que les histoires sont retenues 22 fois plus que de simples faits ? Alors qu’est-ce que c’est exactement que le storytelling ? A quoi ça ressemble vraiment ? Et comment devient-on storyteller ?

 

Le storytelling, qu’est-ce que c’est ?

Le contexte du storytelling 

Bah, facile ! C’est l’art de raconter une histoire ! Ah bon, c’est tout ? Oui, c’est ce que ça veut dire en anglais. Mmmh, c’est quand même un peu plus compliqué. Le storytelling, c’est bien l’art de raconter une histoire, mais, et tout est dans le mais, dans un contexte particulier. Celui du marketing et de la communication.

 

Le contexte du storytelling 
Le contexte du storytelling

 

Adieu, veau, vache et cochon, si on conçoit le storytelling comme un sous-genre de littérature. Car le storytelling est à la littérature ce que l’ice tea est au thé. Un produit transformé plutôt qu’un produit naturel.

Mais, peu importe. Il faut de tout pour faire un monde. Et le champs couvert par le storytelling est non seulement très vaste, mais, en plus, il manquerait s’il n’existait plus. Entendre le regretté Marcel Philippot, interpeller le directeur d’un agence de la Maaf, et après avoir eu sa réponse, conclure par un rageur : je l’aurai, un jour, je l’aurai, est encore dans bien des mémoires. 

Plusieurs définitions du storytelling

Définir le storytelling, c’est déjà toute une histoire. Par suite, les définitions se bousculent. Chacune essayant d’être plus définitive que les autres. Normal, c’est aussi une manière de faire reconnaître son expertise. On peut commencer par la définition suivante : 

Le storytelling est l’art de créer autour d’une marque, des histoires et un fil rouge qui tisseront un lien émotionnel avec ses consommateurs. 

dit l’un. Pour un autre, plus sobre :

Il a pour objectif de créer, puis raconter une histoire au public cible déterminé en amont. 

Brrr. On peut préférer celle d’un storyteller qui se présente comme le roi de sa profession : 

Quand on est storyteller, on se lève le matin, la tête pleine d’histoires et on se couche le soir avec la frustration de ne pas avoir réussi à toutes les raconter et c’est bel et bien ce qui rend mon métier absolument unique. 

C’est beaucoup plus poétique, mais ça manque, quand même, d’un peu de précision.

Bref, en somme, le storytelling, c’est mettre en scène un produit ou un service par le biais d’une histoire. Bon, c’est vrai, c’est un peu plat, mais il ne faut pas non plus exagérer. Il est peut-être temps de voir maintenant comment ça marche. Autrement dit, à quoi ça ressemble exactement, le storytelling ?

 

Plusieurs définitions du storytelling
Plusieurs définitions du storytelling

 

Faire de la communication narrative

C’est l’expression savante pour dire qu’on fait du storytelling. On parle aussi de mise en récit ou d’accroche narrative. Bon, très bien, mais comment on fait concrètement ? Eh bien le plus simple, c’est de se dire que faire du storytelling, c’est faire un conte de faits.

Car, en réalité, la technique narrative qui en est le plus proche, c’est celle du conte de fées. Cela, pour l’inspiration. 

Maintenant, si on veut aller plus loin et éviter de reproduire à l’infini des recettes éculées, on peut passer du vieux schéma habituel pour ce genre d’exercice à un nouveau, un peu plus sophistiqué. 

Le schéma traditionnel du storytelling

Il est fondé sur une trilogie : reconnaissance d’un problème, analyse du problème, promotion d’une solution. C’est simple, direct et ça convient aussi bien à des anecdotes qu’à des discours entiers. Mais, ça a un côté furieusement déjà vu ou déjà entendu.

C’est de là que vient l’impression de recette éculée. De sorte qu’on préfère désormais envisager les choses un peu différemment. Avec plus de passion.

Le nouveau schéma du storytelling

Dans ce nouveau schéma, on commence donc par chercher à capter l’attention du lecteur, de l’auditeur ou du spectateur. Il n’est plus, ici, question de problème, mais de nécessité. Puis, on s’arrange pour stimuler un désir de changement.

Un des meilleurs moyens est de mettre en avant ce que font les voisins d’à côté. Car, c’est bien connu, l’herbe du jardin des voisins est toujours plus verte. Et enfin de mettre de la raison sur ce qui n’est, au fond, qu’une envie. 

 

Le nouveau schéma du storytelling
Le nouveau schéma du storytelling

 

Exemples de storytelling

Le storytelling est partout, dès lors qu’il y a volonté de communiquer et mise en oeuvre d’un plan marketing. Les plus grandes marques y ont recours depuis longtemps. Il sature le champs politique et son emprise devient toujours plus grande à chaque élection.

Mais, il est aussi présent dans les démarches les plus simples du quotidien. Et sa construction ressemble beaucoup à celle de jeux vidéo ou de films de référence comme ceux de la série Indiana Jones. En bref, il est là à chaque fois qu’on veut inciter quelqu’un à faire quelque chose sans passer par la raison raisonnante. 

Storytelling de marque

C’est, par exemple, celui déjà évoqué de la Maaf. L’axe de la mise en récit n’est plus celle de l’entrée tapageuse d’un client dans une agence de l’assureur, mais celui, plus onirique, d’une sorte de descente aux enfers.

Celle du client qui veut garder ses contrats d’assurance à la Maaf plutôt que les confier à son banquier. Pourquoi donc, en effet, changer d’assureur et choisir pour ça son banquier.

Alors même que ce dernier a l’oeil borgne et a eu le culot d’aspirer le dit client, en l’occurrence une cliente avec un gentil chien dans les bras, dans les profondeurs de son antre. Et cela, au moment d’un simple retrait bancaire ! Le filou ! Et alors que l’offre de la Maaf est vraiment très alléchante !  Non, mais, vraiment…

Storytelling politique

C’est celui des fameux spin doctors. Ces conseillers en communication et en marketing politique dont plus aucun homme politique d’envergure ne semble pouvoir se passer. On les voit très bien à l’oeuvre dans des séries télévisées comme le Baron noir, House of cards ou encore Borgen.

Ou lors d’élections comme une élection présidentielle. En général, on commence par concocter la légende du politicien en question. 

Comme dans un conte, il était une fois un homme, ou une femme, issu naturellement d’un milieu modeste, travailleur, avec une excellente expérience professionnelle. Et, bien sûr, naturellement désintéressé.

La preuve, il ou elle abandonne un super salaire pour une rémunération rachitique à partir du moment où il ou elle se met au service de l’intérêt général. Après cette intro, ne reste plus, en général, qu’à mettre en avant les éléments de langage censés justifier et valoriser la politique défendue par il ou elle.

A partir de ce schéma de base, on peut imaginer bien des variantes. 

Storytelling au quotidien 

Mais, le storytelling n’est pas réservé qu’aux spin doctors et aux agences de pub ou aux services marketing des marques. On le trouve aussi largement utilisé par un tas d’associations aux buts les plus divers. Lesquelles ont largement recours aux réseaux sociaux et au digital marketing. De manière plus ou moins organisée. Ainsi, par exemple, la campagne de vaccination 2021 a été un sacré booster dans ce domaine. 

 

Storytelling au quotidien 
Storytelling au quotidien

 

On voit donc fleurir dans son sillage une multitude de communications soulignant qui, les dangers de la vaccination, qui, celle de la non-vaccination, qui, les précautions à prendre, qui, celles à ne pas prendre, etc. A coup d’études inédites, toujours sérieuses, souvent cachées, d’où leur grand intérêt, mais toujours avec un même but, celui de répondre positivement à l’appel pour rejoindre telle association, à suivre telle consigne, ou tout simplement à faire comme les autres.

 

Comment faire du bon storytelling et en faire son métier

Comme on peut le constater, faire du storytelling peut très vite verser dans une manipulation pure et simple des esprits. Laquelle finit toujours, heureusement, par se retourner contre ses auteurs.

Alors comment faire pour qu’il n’en soit pas ainsi et pour que la communication mise en oeuvre par le biais du storytelling ne sorte pas du cercle de la raison et de la réalité ?

Les erreurs à éviter 

Si on suit un processus d’aide à la décision, on peut identifier un certain nombre d’erreurs à éviter. Elles se résument à un mot : l’exagération. Pour faire plus savant, ou plus psychologique, on peut même dire à l’hybris.

C’est-à-dire, en bref, à la perte du sens commun. Avec comme conséquence, et plus ou moins rapidement, si on ne parvient pas à l’éviter, la perte de confiance, le chaos et la chute.

Il y a, notamment, exagération quand :

  • on joue trop sur le suspens. 
  • le second degré n’est plus visible.
  • on gomme systématiquement tout ce qui peut apparaître négatif.
  • la novlangue domine le discours.
  • le héros choisi pour l’histoire n’est pas le bon.
  • On entend partout et fréquemment la même histoire.
  • etc.

Suivre une formation ?

 

Suivre une formation
Suivre une formation

 

A bien y réfléchir, on se dit que le mieux est finalement de suivre une formation spécialisée. Il en existe pas mal. Elles promettent quasiment toutes d’aider à comprendre les besoins du clients, à mettre en place une histoire et, last but not the least, à diffuser cette histoire sur les supports adéquats, print et numériques. Bref, quelque chose de complet. 

Quant aux prérequis pour suivre une de ces formations, ce n’est pas difficile. Il faut, d’abord, avoir une bonne idée de ce qu’est le storytelling. Apprentis romanciers, passez votre chemin. Mais, amateurs d’humour, de scénarios à la Netflix, de synopsis de mangas ou de sémiologie, la porte vous est grande ouverte. 

Il ne s’agit pas non plus de postuler pour faire partie d’un atelier d’écriture. On vous demande simplement de posséder quelques notions de techniques narratives. Et, ce qui n’est pas inutile, de saupoudrer tout ça d’un peu de marketing. Ah, sans oublier, bien sûr, un minimum de créativité.

Quand on suit une formation de ce type dans un établissement, comme l’ISCOM ou l’EFAP, on peut prétendre, après coup, à des métiers comme storyteller, ou data-storyteller, bien sûr, mais aussi comme concepteur-rédacteur, responsable de promotion, directeur de création ou encore directeur artistique. Métiers qui sont plutôt de niveau bac + 5 que niveau baccalauréat, surtout aujourd’hui, et dont les salaires peuvent être conséquents.

Bon, tout le monde n’a pas forcément envie de rentrer dans un moule, ni de retourner à l’école. Cela tombe bien, on peut faire autrement. En freelance. Mais, ça suppose d’avoir et de développer une solide culture générale. 

Développer sa culture générale 

La culture générale, c’est le parfait contre-poison à la démesure engendrée par l’exagération. C’est une potion qui ramène automatiquement les choses à leur juste mesure. Elle délite, sans peine, la marque vantariole, le politicien à éléments de langage et le prosélyte acerbe. Mais, qu’est-ce que c’est que la culture générale ?

Ce n’est pas un programme scolaire, même si ça peut aider. Il faut plutôt voir ça comme un vagabondage dans tout ce qui touche à l’esprit. C’est-à-dire, à la littérature, à la philosophie, à la musique, à la peinture, à l’art, etc. Sans plan préconçu. Mais en se laissant aller au gré de l’impulsion donnée par la curiosité du moment. 

De ce fait, pour acquérir une bonne culture générale, et pour ne prendre que cet exemple, il ne s’agit pas de s’astreindre à lire tous les livres d’une bibliothèque, l’un après l’autre. Non, mais de picorer dans chacun comme si l’ensemble de la bibliothèque n’était qu’un livre unique. Chaque page ou idée picorée devenant par là même sujet de méditation et moyen d’apprécier, à sa juste valeur, ni plus, ni moins, ce qui figure dans le storytelling. 

Et souvent, dans ce cas, on ne dit pas qu’on a affaire à une histoire intéressante, et donc à une proposition qui mérite qu’on s’y arrête, mais qu’on nous raconte tout simplement des histoires. Bref, des boniments. Evidemment, ce n’est pas très bon. 

 

Faut-il abandonner le storytelling à la technologie et aux algorithmes des big data ?

 

Voilà qui sonne bien. On l’a vu le storytelling est une affaire qui marche. Cela paraît simple à faire, mais c’est quand même compliqué. L’exagération guette le néophyte et avec elle, le désastre en ligne de mire pour tout son management. On peut prendre des précautions pour tenter d’éviter les plus grosses bourdes, mais ça ne suffit pas toujours. Alors, on peut céder aux sirènes d’un de ces excellents établissements de formation spécialisés.

Le seul véritable risque est celui de devenir aussi un excellent rouage de la gigantesque machinerie à produire du message. Pendant un certain temps, du moins. D’où l’intérêt de se constituer une solide base de culture générale pour préserver sa créativité et sa capacité à mettre en récit une histoire qui a du sens. Ou, au minimum, qui ne ressemble pas à celle d’un bonimenteur de foire

Reste que tout ça peut très bien ne pas suffire. D’où le recours de plus en plus prononcé aux big data. C’est-à-dire à l’analyse massive par des algorithmes et des logiciels appropriés de l’énorme masse d’informations recueillies à chaque instant sur chaque parcelle de l’humanité.

Les experts en science des données peuvent ainsi espérer savoir ce qui peut convenir précisément à un segment marketing bien défini et bâtir une stratégie de communication en conséquence. Et surtout que lui dire !

Mhmm ! Allez, ce n’est pas demain la veille. Pas plus demain qu’aujourd’hui une machine ne pourra être capable de remplacer une rédaction humaine. A une condition toutefois.  Que cette rédaction soit de qualité. Et pour s’y essayer ou l’entretenir, rien ne vaut l’autoédition.

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